CNCIS – 17e rapport d’activité 2008

L’article 6 de la loi invitait le ministre de l’Intérieur à prendre les
mesures qu’il jugerait nécessaires pour prévenir les abus de pouvoir. Il
a été indiqué que de telles mesures avaient été prises, mais, pour des
motifs de sécurité nationale, le détail de leur contenu n’a pas été divulgué. La loi de 1985 instituait également une juridiction – la commission
de recours contre les interceptions de communications (Interception of
Communications Tribunal – « la CRIC ») – compétente pour connaître des
griefs des personnes se prétendant victimes d’une interception de communications et prévoyait la désignation d’un commissaire chargé d’établir des rapports sur les interceptions et de les contrôler.
Les requérantes sont une organisation britannique et deux organisations irlandaises de protection des libertés civiles. Elles alléguaient
devant la Cour que, entre 1990 et 1997, leurs communications par téléphone, télécopie et courriel, dont certaines contenaient des informations
juridiques couvertes par le secret professionnel et des renseignements
confidentiels, avaient été interceptées au moyen d’un dispositif électronique géré par le ministère britannique de la Défense. Elles avaient auparavant contesté la légalité des interceptions alléguées devant la CRIC, le
Director of Public Prosecutions et la commission des pouvoirs d’enquête
(Investigatory Powers Tribunal – « la CPE »), mais ces autorités avaient
conclu à l’absence d’infraction à la loi de 1985. La CPE avait notamment
jugé que le mandat habilitant les autorités à intercepter et analyser des
données ainsi que les conditions de réalisation de ces opérations étaient
d’une accessibilité et d’une prévisibilité suffisantes au regard de la loi (loi
de 1985 a été abrogée par une loi nouvelle).
En droit : la simple existence d’une législation autorisant la surveillance secrète de communications crée une menace de surveillance pour
tous ceux auxquels on pourrait l’appliquer. Il s’ensuit qu’il y a eu ingérence
dans les droits des requérantes. L’article 3 § 2 de la loi de 1985 conférait
aux autorités britanniques une latitude pratiquement illimitée pour interDFQUFSEFTDPNNVOJDBUJPOTFOUSFMF3PZBVNF6OJFUVOFQFSTPOOFTJUVÏF
hors du territoire britannique. Les mandats pouvaient porter sur un très
large éventail de communications. En théorie, toute personne émettant ou
recevant des communications extérieures aux îles britanniques était susceptible de faire l’objet d’une telle mesure à l’époque pertinente. En outre,
les autorités avaient une grande liberté dans le choix des communications
à lire ou à écouter parmi celles qui avaient été enregistrées.
S’il est vrai que, au cours de la période pertinente, des directives
internes, des manuels et des circulaires prévoyaient des mesures de
protection contre les abus de pouvoir et que les rapports annuels du
commissaire désigné en vertu de la loi de 1985 pour en contrôler la mise
en œuvre ont tous indiqué que les « mesures » en question étaient satisfaisantes, leur contenu n’a jamais été précisé par la loi ou rendu public
d’une autre manière. Par ailleurs, bien que le Gouvernement ait allégué
que la divulgation d’informations sur ces mesures au cours de la période
pertinente aurait pu nuire à l’efficacité du système de collecte du ren-

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