Ces libertés ne sont pas absolues : puisque la manifestation par une personne de ses
convictions religieuses peut avoir des conséquences pour autrui, les rédacteurs de la
Convention ont assorti ce volet de la liberté de religion des réserves émises au second
paragraphe de l’article 9. Ce dernier dispose que « toutes restrictions à la liberté de
manifester sa religion ou sa conviction doivent être prévues par la loi et constituer des
mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de
l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés
d’autrui. »
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) reprend avec
constance cette circonstance que la restriction à la liberté de manifester sa religion ou sa
conviction doit être prévue par la loi et nécessaire, dans une société démocratique, à la
poursuite de l’un ou de plusieurs des buts légitimes qui y sont énoncés (CEDH, 2013, Eweida
et autres c. Royaume-Uni, § 80 n° 48420/10, 59842/10, 51671/10 et 36516/10). En d’autres
termes, les limitations prévues au second paragraphe de l’article 9 portent uniquement sur le
droit de manifester une religion ou une conviction et non sur le droit d’en avoir (CEDH, 2007,
Ivanova c. Bulgarie, § 79 n° 52435/99).
La CEDH a considéré que les ingérences suivantes étaient nécessaires à la préservation de la
sécurité publique et ne constituaient pas une violation de l’article 9 de la Convention :
− la décision des autorités britanniques de fermer le site historique de Stonehenge au
moment du solstice d’été et de ne pas autoriser un groupe d’adeptes du druidisme d’y
célébrer leur cérémonie solsticiale. La Commission européenne des droits de l’Homme
a estimé qu’à supposer même qu’il y avait eu ingérence dans l’exercice des droits au
titre de l’article 9, celle-ci visait à préserver la sécurité publique et était justifiée au
sens du second paragraphe du même article, considérant notamment le fait que les
autorités avaient préalablement déployé des efforts sincères essayant de satisfaire les
intérêts des particuliers et des organisations s’intéressant à Stonehenge (Chappell c.
Royaume-Uni ; voir également Pendragon c. Royaume-Uni, décision de la
Commission du 14 juillet 1987, n° 12587/86) ;
− la condamnation à une amende avec sursis pour « trouble à la paix » de plusieurs
personnes opposées à l’avortement qui avaient pénétré dans les locaux d’une clinique
pratiquant des d’avortements et tenu une prière collective à genoux dans le couloir de
l’établissement. La Commission a reconnu que la manifestation litigieuse tombait dans
le champ d’application de l’article 9, mais que l’ingérence dénoncée était clairement
justifiée au regard du second paragraphe du même article (Van Schijndel et autres c.
Pays-Bas, décision de la Commission du 10 septembre 1997 n° 30936/96) ;
− l’interdiction imposée à une paroisse catholique par la municipalité, de sonner la
cloche de l’église avant 7h30 au-dessus d’un certain volume. La Cour a décidé que
cette ingérence visait le but légitime de protection des droits d’autrui - en l’espèce, du
repos nocturne des riverains et était proportionnée à ce but. En effet, entre 23 heures et
7 h 30, la cloche pouvait toujours être sonnée à condition d’en baisser le volume ;

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