29. Dans ces conditions, soulève une deuxième difficulté sérieuse d’interprétation du droit de
l’Union européenne la question de déterminer si la directive du 12 juillet 2002 lue à la lumière de la
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne doit être interprétée en ce sens qu’elle
autorise des mesures législatives relevant d’activités concernant la sécurité publique, la défense et la
sûreté de l’Etat telles que les mesures de recueil en temps réel des données relatives au trafic et à la
localisation d’individus déterminés, qui, tout en affectant les droits et obligations des fournisseurs
d’un service de communications électroniques, ne leur imposent pas pour autant une obligation
spécifique de conservation de leurs données.
Quant à l’accès des autorités nationales compétentes aux données conservées :
30. Dans son arrêt du 21 décembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a également dit
pour droit que l’article 15, paragraphe 1, de la directive du 12 juillet 2002 “ doit être interprété en ce
sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale régissant la protection et la sécurité des données
relatives au trafic et des données de localisation, en particulier l’accès des autorités nationales
compétentes aux données conservées, sans limiter, dans le cadre de la lutte contre la criminalité, cet
accès aux seules fins de lutte contre la criminalité grave, sans soumettre ledit accès à un contrôle
préalable par une juridiction ou une autorité administrative indépendante, et sans exiger que les
données en cause soient conservées sur le territoire de l’Union. “. La Cour a, à cette occasion,
estimé “ qu’il importe que les autorités nationales compétentes auxquelles l’accès aux données
conservées a été accordé, en informent les personnes concernées, dans le cadre des procédures
nationales applicables, dès le moment où cette communication n’est pas susceptible de
compromettre les enquêtes menées par ces autorités. En effet, cette information est, de fait,
nécessaire pour permettre à celles-ci d’exercer, notamment, le droit de recours, explicitement prévu
à l’article 15, paragraphe 2, de la directive 2002/58, lu en combinaison avec l’article 22 de la
directive 95/46, en cas de violation de leurs droits “.
31. Soulève une troisième difficulté sérieuse d’interprétation du droit de l’Union la question de
déterminer si la directive du 12 juillet 2002, lue à la lumière de la Charte des droits fondamentaux
de l’Union européenne, doit être interprétée en ce sens qu’elle subordonne dans tous les cas la
régularité des procédures de recueil des données de connexion à une exigence d’information des
personnes concernées lorsqu’une telle information n’est plus susceptible de compromettre les
enquêtes menées par les autorités compétentes ou si de telles procédures peuvent être regardées
comme régulières compte tenu de l’ensemble des autres garanties procédurales existantes, dès lors
que ces dernières assurent l’effectivité du droit au recours.
32. Les trois questions énoncées aux points 25 à 31 sont déterminantes pour la solution des litiges
que doit trancher le Conseil d’Etat sur les quatre décrets attaqués en tant qu’ils ont été pris pour la
mise en oeuvre des articles L. 851-1 à L. 851-4 du code de la sécurité intérieure. Elles présentent,
ainsi qu’il a été dit, plusieurs difficultés sérieuses d’interprétation du droit de l’Union européenne. Il
y a lieu, par suite, d’en saisir la Cour de justice de l’Union européenne en application de l’article
267 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et, jusqu’à ce que celle-ci se soit
prononcée, de surseoir à statuer, dans cette mesure et sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de
non-recevoir opposées en défense, sur les requêtes des associations requérantes et de rejeter le
surplus de leurs conclusions.

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