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Si l’on peut se féliciter de l’existence de celle-ci, sa mise en œuvre et à la
réalité des poursuites engagées à l’encontre des personnes qui dévoilent l’identité
d’agents des services suscitent certaines réserves quant à l’efficacité réelle du
dispositif ainsi institué. En effet, il ne semble pas que les infractions commises
dans le cadre d’une activité journalistique ou éditoriale soient poursuivies avec
toute la rigueur qu’elles méritent au regard de la mise en danger des personnels.
Ainsi, aucune condamnation n’a à ce jour été prononcée sur le fondement
de cet article (1). Il faut souhaiter que l’entrée en vigueur, récente, de cette
incrimination explique à elle seule une telle inertie. Par ailleurs, une seule affaire
est actuellement en cours, qui concerne la révélation de l’identité de deux agents
de la DCRI par Olivia Recasens, Didier Hassoux et Christophe Labbé dans leur
ouvrage intitulé L’espion du Président. Le 27 février 2013, le tribunal
correctionnel de Paris a d’ailleurs jugé recevable, contre l’avis du parquet, une
question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’interdiction de révéler
l’identité des personnels du même service. La Cour de cassation devra donc se
prononcer sur le renvoi de cette QPC devant le Conseil constitutionnel.
Mais comment comprendre l’inaction du ministère de l’Intérieur après la
parution, dans la presse, de l’identité des agents de l’antenne toulousaine de la
DCRI à la suite de l’affaire Merah ? La mission déplore qu’aucune poursuite
n’ait été engagée à cette occasion, tant pareille révélation semble gravement
porter atteinte à la protection des personnels.
Mais le problème auquel sont confrontés les services de renseignement
revêt également une origine interne. Il n’est désormais plus rare que d’anciens
agents décident de relater certains souvenirs de leur vie professionnelle antérieure
dans des œuvres journalistiques ou littéraires (cf. encadré ci-après), alors même
qu’ils sont, au même titre que les personnels en poste, soumis au secret de la
défense nationale. Et si dans de tels cas les directions n’hésitent pas à saisir la
justice, ce que la mission approuve pleinement, les décisions des tribunaux, en
revanche, ne se signalent pas toujours par leur cohérence.
À titre d’exemple, à la suite de la parution des mémoires de Pierre
Martinet, le ministère de la Défense avait porté plainte en octobre 2005 contre son
ex-fonctionnaire pour « violation du secret de la défense nationale ». L’intéressé a
d’ailleurs été condamné le 16 juin 2006 à quinze mois de prison avec sursis et
5 000 euros d’amende. Mais, plus récemment, Maurice Dufresse, ancien
sous-directeur de la DGSE, a quant à lui été relaxé en septembre 2012 pour la
révélation de l’identité de deux agents de la DGSE dans son livre Vingt-cinq ans
dans les services secrets, l’identité de ces deux agents ayant été révélée par la
presse avant la parution de l’ouvrage en question. Cependant, une procédure est
toujours en cours, le service estimant que l’ouvrage viole à de nombreuses reprises
le secret de la défense nationale.
(1) Réponse de la direction des affaires criminelles et des grâces.