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Mme Sophie Rohfritsch. C’est sur les moyens financiers et humains que
je vous interrogerai. Vous souhaitez permettre aux services de renseignement un
accès privilégié aux données de connexion et aux téléphones portables. Or ces
services sont facturés à un prix élevé, ce qui amène le parquet à ne délivrer que
peu d’autorisations. Sur ce sujet, où en sont vos discussions avec les opérateurs ?
D’autre part, le texte permettra-t-il de revoir le partage des tâches
s’agissant notamment de la gendarmerie ? Je déplore que, depuis des années, les
gendarmes effectuent les transfèrements – qui devraient être assumés par le
ministère de la Justice – et renoncent par conséquent à assumer d’autres missions
stratégiques.
M. le ministre de la Défense. En réaction aux propos de M. Coronado, je
ferai part de mon expérience de ministre de la Défense. Lorsqu’un terroriste
décapite un homme dans un pays étranger, des connexions se mettent en place sur
notre territoire, pour identifier les réseaux sociaux qui montrent la scène. Un
algorithme vérifie immédiatement les connexions qui assurent la diffusion de
l’acte terroriste commis en Jordanie, en Iran, en Irak ou en Syrie. Il s’agit non pas
de pêche au chalut, mais de ciblage de réseau. Une telle intervention, qui n’existe
que dans le cadre de la lutte antiterroriste, ne lèse pas les libertés. Elle est
néanmoins soumise à la décision du Premier ministre et au contrôle de la CNCTR.
Mme la garde des Sceaux. Madame Rohfritsch, vous demandez que les
transfèrements, ou extractions judiciaires, reviennent au ministère de la Justice.
C’est fait. L’accord signé début 2012 entre le ministère de l’Intérieur et la
chancellerie n’était pas équitable car il transférait les extractions judiciaires au
service pénitentiaire sans transférer les équivalents temps pleins correspondants.
Nous avons donc travaillé ensemble pendant un an et demi pour aboutir à un
accord plus équitable et réaliste, transférant la totalité des extractions judiciaires
au ministère de la Justice. Un certain nombre de bassins sont déjà totalement en
charge, et le transfert devrait être achevé d’ici à 2019.
Par ailleurs, nous travaillons avec le ministère de l’Intérieur et les
responsables de la gendarmerie au transfert de missions actuellement assurées par
les gendarmes et qui pourraient l’être par mon ministère. Nous conduisons ce
travail en bonne intelligence, depuis un an et demi également. Nous avons mis en
place des procédures allégeant considérablement le travail des gendarmes, telles
que les trames, ces formulaires types qui leur permettent de remplir des procèsverbaux très rapidement. Le groupe de liaison de la gendarmerie s’est exprimé
publiquement pour dire à quel point cette procédure soulageait leur travail.
Mon ministère bénéficiera de 950 emplois supplémentaires, dont 483 pour
l’administration pénitentiaire – des emplois qui s’ajoutent aux 500 créés
annuellement au ministère depuis 2012. Nous diversifions les compétences de
l’administration pénitentiaire et particulièrement du renseignement pénitentiaire.
Nous recruterons vingt-deux informaticiens, quatorze analystes veilleurs, pour
animer la cellule de veille permanente sur les réseaux sociaux, quarante-quatre