- 218 -
d’euros. Un tel projet n’aurait en tout état de cause de sens que s’il était
porté à l’échelle européenne.
C’est aussi des Européens que pourrait venir le salut de la viabilité
commerciale d’Ariane 6, au travers d’un « Buy European Act » pour les
lanceurs, à l’image des Américains et de leur « Buy American Act ». C’est
effectivement par un accroissement de la demande institutionnelle que nous
réduirons la dépendance d’Ariane 6 au marché commercial 1 : les commandes
institutionnelles représentent environ un tiers des lancements européens
contre près des trois quarts pour les États-Unis. Un « Buy European Act »
permettrait de sécuriser la pérennité d’un lanceur européen.
Recommandation n° 46 : Afin d’améliorer la compétitivité du
lanceur Ariane 6, introduire un « Buy European Act » pour garantir un
nombre de commandes institutionnelles nécessaires à la viabilité
financière et commerciale du programme.
Il ne doit pas s’agir de renoncer au programme d’Ariane 6, mais d’y
ajouter une offre que les Européens ne proposent pas aujourd’hui pour les
mises en orbite basse. La France a tout intérêt à la viabilité d’Ariane 6, car il
en va de la pérennité du centre de tir de Kourou qui ne se justifie que pour
les mises en orbite géostationnaire, les lancements en orbite basse pouvant
s’opérer de n’importe où. Quoi qu’il en soit, le maintien de notre capacité en
matière de « grands lanceurs » est avant tout une question de souveraineté,
et non de rentabilité.
Du point de vue de la rentabilité, l’enjeu pour Ariane c’est donc la
diversification de son offre dans le contexte du « New Space » qui pourrait
passer par le développement d’un lanceur réutilisable dédié aux
minisatellites. Dans le cadre du projet Altair porté par l’ONERA, un
démonstrateur de drone emportant à 10 000 ou 12 000 mètres d’altitude un
petit lanceur classique a ainsi été testé à Kourou en 2019. En plus du drone,
réutilisable, au moins un des étages du lanceur serait en outre réutilisable.
2. Notre dépendance
Alors que le « New Space » rebat les cartes, la souveraineté française
dans le domaine spatial se trouve doublement fragilisée, d’une part en raison
de notre dépendance, au moins partielle, à l’égard des États-Unis, mais aussi
du fait des stratégies nationales observées au sein de l’Union européenne.
a) A l’égard des États-Unis
Notre dépendance envers les États-Unis est liée à notre incapacité à
disposer seuls d’une connaissance exhaustive de l’état de l’espace. Le
Pentagone publie un catalogue des objets spatiaux avec, pour chacun, des
1
Ariane 5 est pour sa part dépendante à 75 % du marché commercial.