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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE
de combattants d’al-Nosra ont ainsi quitté ses rangs pour rejoindre ceux de
l’organisation irakienne, et la grande majorité des Français partant pour le
djihad rallient Daech plutôt que le Front de la victoire.
Daech a dans le même temps rompu ses liens avec Al-Qaïda en Irak,
où la nébuleuse opérait au travers de sa branche AQPA (Al-Qaïda dans la
Péninsule Arabique). Alors que ce mouvement était encore très actif en 2012
et 2013 sur le territoire irakien, l’EIIL a peu à peu affirmé son autonomie en
se détachant des directives opérationnelles d’Al-Qaïda et en organisant ses
propres campagnes, comme en juillet 2013 à la prison d’Abu Ghraib. Après
la victoire de Fallouja en janvier, la prise de Moussoul et la proclamation du
califat islamique le 29 juin 2014 ont définitivement marqué
l’indépendance de Daech.
Plusieurs groupes islamistes radicaux ont alors affirmé leur soutien
et leur affiliation à Daech, parmi lesquels comptent notamment le groupe
Jund al-Khalifa, responsable de l’assassinat d’Hervé Gourdel, en Algérie,
Ansar Beït al-Maqdess dans le Sinaï, et Majilis Shura Shabab al-Islam à
Derna en Libye – sur le seul territoire administré par une franchise de l’État
islamique.
Au total, Daech exerce aujourd’hui son contrôle sur un vaste
territoire peuplé d’environ huit millions d’habitants, à cheval sur l’Irak et la
Syrie, et dont les deux centres de gravité se trouvent à Raqqa et à Mossoul.
Cette dynamique de territorialisation, qui a toujours été au cœur
des objectifs de l’EIIL, modifie profondément la nature de la menace
terroriste. Avec la proclamation du califat, Daech prétend organiser un
véritable État au projet islamiste, débordant les frontières existant depuis les
accords Sykes-Picot.
La démarche est nouvelle. Le noyau terroriste historique que
constitue Al-Qaïda, qui a son centre dans les zones tribales de l’Afghanistan
et du Pakistan et repose sur plusieurs organisations franchisées au niveau
local – Aqmi au Sahel, les Shebab en Somalie, Aqpa au Yémen, Jabhat alNosra en Syrie – cherche avant tout à déstabiliser les pays occidentaux, et
par là leur soutien aux pays arabes considérés comme infidèles, en
organisant des attentats spectaculaires en Occident. Al-Zawahiri considère
ainsi que le djihad doit être achevé avant que la construction d’un
quelconque projet politique puisse être envisagée.