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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

radicalisés serait encore insuffisamment intégrée aux stratégies de lutte
contre la radicalisation djihadiste.
Cette lacune est d’abord constatée en amont du passage à l’acte : de
l’avis de plusieurs des personnes entendues, certains profils de djihadistes
présenteraient des troubles psychopathologiques, parfois lourds, non
détectés, qui nécessiteraient pourtant un suivi adapté. Dans certains cas, le
défaut de diagnostic résulterait de l’absence de formation des personnels de
la santé mentale en matière de radicalisation 1.
Elle existe également en aval. Les djihadistes de retour ont été la
plupart du temps confrontés à des expériences traumatisantes telles que la
participation à des scènes d’une extrême violence (mises à mort par
décapitation, crucifixion, flagellation ou encore lapidation) ou la mort d’un
proche sur le terrain, qui peuvent d’ailleurs être à l’origine de la décision de
regagner le territoire français. Ils se trouvent dès lors bien souvent dans une
situation de fragilité psychologique qui peut se traduire par des pulsions
suicidaires, mais aussi par la tentation du passage à l’acte terroriste. L’une
des personnes entendues par votre commission d’enquête se demandait plus
largement si la tolérance à la violence acquise au cours de la période de
radicalité est compatible, en dehors de toute prise en charge psychiatrique,
avec le retour à une existence intégrée à la société française.
 Dans ce contexte, un accompagnement psychologique peut
recouvrir soit un simple soutien psychologique, soit une prise en charge
psychiatrique, comprenant notamment des soins post-traumatiques, dans le
cadre des règles fixées par la loi. Par principe, les soins psychiatriques ne
peuvent en effet être dispensés qu’avec le consentement des personnes, en
dehors du cas spécifique de la mise en œuvre de soins sans consentement à
la demande d’un tiers ou du représentant de l’État (art. L. 3212-1 et suivants
du code de la santé publique). En particulier, le dépistage d’éventuels
troubles psychopathologiques ne peut être réalisé dans une perspective de
prévention de la radicalisation. Le dépistage par le biais d’une expertise
psychiatrique ne peut effet être réalisé que dans le cadre de procédures
judiciaires et ne saurait intervenir in abstracto. S’agissant des mineurs, si une
évaluation psychiatrique peut être ordonnée par le juge au titre des mesures
d’assistance éducative en application de l’article 375 du code civil, une telle
mesure est prononcée dans une perspective thérapeutique et non de
prévention de détection.
Ainsi que cela a été indiqué à votre commission d’enquête, une
réunion tenue le 4 février 2015 entre le CIPD et les différentes directions
concernées du ministère des affaires sociales a permis d’identifier plusieurs
leviers d’action pour améliorer l’accompagnement psychologique des
personnes radicalisées : une meilleure information des professionnels de
Voir sur ce point la proposition de votre commission d’enquête relative à la formation des
personnels de terrain, page 130.
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