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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

reprochant d’être islamophobes, ou pour les musulmans, moins croyants que leur
enfant ! ». Le premier mouvement des familles est souvent de s’adresser aux
forces de l’ordre, qui se trouvent cependant bien souvent désemparées pour
définir la réponse publique à apporter à une situation considérée comme
relevant de la sphère religieuse, et donc privée. Les phénomènes de
changement de vie, dès lors qu’ils ne s’accompagnent pas d’infractions
manifestes, ne peuvent en effet relever de la lutte antiterroriste policière. En
avril 2014, des parents des jeunes djihadistes ayant rejoint la Syrie ont ainsi
organisé à Paris une conférence de presse au cours de laquelle ils ont fait
part de leur désarroi face au renvoi successif de leurs demandes
d’administration en administration, sans qu’aucune réponse ne leur ait été
apportée.
 Face à ces difficultés, il est indispensable de créer des compétences
spécifiques au sein de chacune des administrations de proximité et de
donner aux agents concernés des outils de compréhension du processus de
radicalisation.
Cette démarche doit d’abord concerner les acteurs éducatifs ou en
charge de l’encadrement des jeunes : il s’agit principalement des personnels
enseignants ou des conseillers d’éducation dans les établissements scolaires,
ainsi que des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), ou
encore des éducateurs sportifs. Comme souligné à plusieurs reprises devant
votre commission d’enquête, les éducateurs, qui se trouvent au contact direct
des jeunes, cibles les plus vulnérables de la propagande djihadiste, doive nt
constituer un maillon central de la prévention de la radicalisation.
La démarche doit également en direction des personnels en charge
de missions de sécurité : les personnels pénitentiaires comptent parmi les
plus exposés, du fait de leur proximité avec des détenus parfois eux-mêmes
vulnérables au prosélytisme djihadiste ; les effectifs de la police municipale,
dont les missions comportent un volet important de prévention au plus
proche du terrain, sont également concernés.
Elle doit par ailleurs toucher les personnels chargés d’une mission
d’accompagnement social du public. Il s’agit notamment des agents des
forces de police, de l’aide sociale à l’enfance (ASE), des juges en charge des
affaires familiales, des assistants sociaux ou encore des personnels relevant
des organismes de sécurité sociale (OSS), et notamment des caisses
d’allocations familiales (Caf).
Enfin, les professionnels de la santé mentale peuvent également
être concernés. Ceux-ci sont en effet amenés à prendre en charge des
individus qui leur sont adressés soit au stade de l’entrée dans la
radicalisation, soit à l’occasion des manifestations psychologiques de plus ou
moins grande gravité qui accompagnent fréquemment la sortie de ce
processus, voire le retour en France après un séjour sur la zone de conflit. Or,
selon les indications fournies à votre commission d’enquête, ces

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