3. La solution retenue par le législateur français
Lorsqu’il a rénové le cadre juridique applicable aux activités de
renseignement en 2015, le législateur français a dû, au regard des principes
constitutionnels nationaux, concilier des exigences parfois opposées.
Comme le conseil constitutionnel l’a jugé113, il devait favoriser « la
prévention des atteintes à l’ordre public et des infractions, nécessaire à la
sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle » et ne pas
porter atteinte au « secret de la défense nationale, qui participe des
exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts
fondamentaux de la Nation ». D’autre part, il devait favoriser « l’exercice
des droits et des libertés constitutionnellement garantis », au nombre
desquels « figurent le droit au respect de la vie privée, l’inviolabilité du
domicile et le secret des correspondances, protégés par les articles 2 et 4 de
la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 » ainsi que « le
droit des personnes intéressées à exercer un recours juridictionnel effectif,
le droit à un procès équitable ainsi que le principe du contradictoire »
découlant de l’article 16 de la même Déclaration.
Pour effectuer la conciliation entre ces exigences, la loi n’a pas prévu de
mécanisme de notification mais a institué des voies de recours ouvertes à
toute personne.
La loi dispose que la mise en œuvre des techniques de renseignement, dès
lors qu’elle est couverte par le secret de la défense nationale, ne peut être
portée à la connaissance des personnes surveillées ni par l’autorité de
contrôle indépendante qu’est la CNCTR, ni par le juge administratif chargé
d’apprécier la légalité des mesures de surveillance. L’article L. 833-4 du code
de la sécurité intérieure défend ainsi à la CNCTR de « confirmer ni infirmer »
la mise en œuvre d’une technique. Lorsqu’il constate qu’aucune illégalité n’a
été commise, le Conseil d’État est soumis à la même interdiction, en vertu
de l’article L. 773-6 du code de justice administrative.
113 - Voir la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-713 DC du 23 juillet 2015, notamment ses paragraphes
n° 2 à n° 5 et n° 82.