CNIL 27e RAPPORT D’ACTIVITÉ 2006
La question se pose donc de maintenir cette procédure
d’accord préalable, alors même qu’une instruction du
15 avril 2005 adressée par le ministre de l’Intérieur
aux préfets leur fait désormais obligation de motiver leur
décision de refus et d’indiquer précisément les raisons de
celui-ci et notamment les faits pour lesquels ils sont signalés
dans le STIC. Dès lors que les intéressés connaissent les
motifs pour lesquels ils sont fichés (au moins pour ce qui
concerne les personnes employées ou susceptibles de
l’être dans le cadre d’activités de sécurité privée), on peut
légitimement s’interroger sur l’intérêt qu’il y a à requérir le
double accord du ministère de l’Intérieur et du parquet.
Il en est de même s’agissant des victimes : dès lors qu’elles
ont déposé plainte pour tel ou tel fait, et que la procédure
qui s’ensuit donne lieu à signalement dans le STIC, on ne
comprend pas véritablement les raisons pour lesquelles
elles ne pourraient pas accéder directement au contenu
de leur fiche.
Le problème des infractions
mineures et de la durée
de conservation
Quel est le bien fondé d’une consultation systématique à
des fins administratives des fichiers de police judiciaire
s’agissant des personnes mises en cause pour des faits
relevant d’une contravention de 5e classe ou de certains
Questions à …
délits qui, à l’évidence, ne mettent pas en cause « la
protection de la sécurité des personnes ou la défense des
intérêts fondamentaux de la nation » ?
La CNIL a ainsi eu connaissance de plusieurs cas de
personnes licenciées (alors qu’elles étaient employées
depuis de nombreuses années dans une société de
sécurité) ou refusées à l’embauche en raison d’un signalement dans le STIC, pour des infractions qui, après lecture
de la procédure, ne relevaient pas, de son point de vue ni
d’ailleurs de l’avis du parquet compétent, des cas justifiant
que la personne ne soit pas recrutée ou soit licenciée : par
exemple des cas de signalement pour violences conjugales (dont il s’avérait, à la lecture de la procédure, qu’il
s’agissait d’un différend réglé par la voie d’un classement
sans suite) ou pour non-représentation d’enfant dans le
cadre d’un divorce, ou d’infractions telles que des atteintes
à la dignité de la personne (qui relevaient plutôt d’un
problème relationnel entre un professeur et son élève).
Comme la CNIL l’a déjà souligné, il apparaît indispensable qu’une véritable réflexion de fond
soit menée sur ce sujet. À cet égard, la situation
risque de s’aggraver, d’une part avec l’élargissement
considérable de la liste des enquêtes donnant lieu à
consultation des fichiers de police judiciaire, que consacre
le décret du 6 septembre 2005, et d’autre part, avec
l’extension possible du champ d’application du fichier
STIC à l’ensemble des contraventions de 5e classe contre
les biens, contre les personnes et contre la nation, l’État ou
la paix publique.
Que pensez-vous des propositions du groupe de travail ?
La Commission souscrit à ces propositions qui, pour une large
FRANÇOIS GIQUEL
Conseiller maître honoraire
à la Cour des comptes
Commissaire en charge du secteur
« sécurité »
Selon quelles modalités la CNIL a-t-elle contribué aux travaux
du groupe ?
À la demande du président de la CNIL, j’ai représenté la
Commission au sein du groupe de travail et participé à
l’ensemble de ses séances et j’ai ainsi pu faire part des constats
et propositions de notre Commission sur cette question qui
constitue depuis longtemps pour nous un important sujet de
préoccupations. Je tiens à cet égard à souligner la qualité des
travaux menés par le groupe ainsi que la richesse des débats.
Par différentes contributions écrites, souvent illustrées de
statistiques précises et de cas concrets, nous avons dressé, à la
demande du groupe de travail, un état des dysfonctionnements
constatés par la CNIL dans l’utilisation administrative du fichier
de police judiciaire STIC, tels qu’ils ont pu être relevés dans le
cadre de l’instruction des demandes de droit d’accès indirect
qui lui sont présentées.
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part, s’inscrivent dans le cadre de ses propres préconisations.
Ainsi, elle est tout à fait favorable à ce qu’une véritable action
de communication publique sur les modalités de fonctionnement
des fichiers de police judiciaire soit réalisée chaque année
et à ce que les personnes signalées dans ces fichiers soient
mieux informées de leurs droits (et en particulier de leur droit
d’accès) et des voies de recours existantes. Il faut améliorer la
transparence des fichiers.
Elle ne peut aussi qu’accueillir favorablement les différentes
propositions formulées par le groupe de travail pour assurer
une mise à jour régulière des fichiers de police judiciaire,
telles que la mise en place d’un groupe de travail police
– justice – gendarmerie chargé d’étudier, de façon concertée,
les modalités d’amélioration des systèmes informatiques de ces
différentes administrations. De même, la démarche « qualité »
dans l’alimentation et la mise à jour des fichiers par ceux qui en
sont responsables doivent être bien évidemment poursuivies.
Enfin, la Commission approuve pleinement la recommandation
du groupe de travail préconisant une réflexion de fond sur les
modalités de prise en compte des contraventions de 5e classe
dans le cadre des enquêtes administratives,