que leur amertume apparaissait parfois dans les commentaires
des médias.
Dans ce contexte de communication insuffisante, en l’absence
de toute motivation de la décision de l’autorité ministérielle,
magistrats, médias et opinion publique éprouvent une
profonde frustration quand les documents ne sont pas déclassifiés ou quand leur contenu rendu public ne correspond pas aux
attentes, plus ou moins phantasmatiques. À ce titre la loi de
1998 n’a pas atteint son but qui était aussi de désamorcer les
spéculations, but non avoué mais pourtant bien transparent.
Si le juge et par suite les médias ont tendance à survaloriser la
part du secret qui leur demeure inaccessible, c’est parce qu’ils
sont confortés en cela par le silence des ministres auxquels
incombe formellement la décision finale, alors que la Commission ne peut publier, aux termes de la loi, que des avis non
motivés. Sans doute, lorsque le secret est maintenu sur
quelque partie d’une affaire déterminée, il est par définition
impossible ou au moins très difficile d’en justifier les raisons,
sans en dévoiler les tenants et aboutissants, mais la Commission au prix d’un effort rédactionnel important parvient, même
dans les cas les plus complexes, à adresser au ministre un
« relevé d’observations » qui est loin d’être neutre. Cet instrument, non prévu par la loi, ne donne lieu, de la part des ministres, à aucune exploitation.
Il y a donc un sérieux problème, qui demeure posé après six
ans, et que les libertés que la Commission s’est autorisée à
prendre avec la lettre de la loi sinon avec son esprit, n’ont que
partiellement résolu. Nombreux sont ceux qui en sont conscients. Certains s’en accommodent, car ils voient dans cette
situation une source d’affaiblissement de la légitimité du
secret. Les autres, qui savent que l’on ne peut raisonnablement
se passer du secret de la défense nationale cherchent des solutions. Les gouvernements successifs pour leur part, depuis six
ans, ont choisi d’ignorer la question.
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