Avis et préconisations de la Commission

Cette fourniture peut être le fait d’auteurs divers (ingénieurs,
agents de renseignement de pays tiers, « honorables correspondants »,
officines « spécialisées » dans l’espionnage économique) et être destinée
non seulement à des services de renseignements de pays tiers (« puissances étrangères ») mais également à des entreprises ou des organisations étrangères.
Ce transfert illicite d’un procédé de fabrication, détenu exclusivement par un groupe national leader dans sa spécialité, est bien de nature
à porter gravement atteinte aux éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France. Il constitue sans aucun doute une
atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation. Les éléments constitutifs d’une suspicion de commission du délit visé à l’article 411-7 du Code
pénal, dont on remarquera qu’il constitue un mode original de répression de la tentative (le recueil des informations sans livraison de celles-ci
est en soi punissable), sont réunis. En ce cas, l’interception de sécurité
est parfaitement fondée en droit.
Il résulte de ces incriminations pénales qu’en dépit de la définition
extensive donnée au concept d’intelligence économique, les interceptions sollicitées sous le motif « sauvegarde des éléments essentiels du
potentiel scientifique et économique de la France », dont la formulation
est directement reprise du Code pénal, correspondent à des faits précis
et à des infractions prévues par le législateur.
La jurisprudence de la Commission, pour ce qui concerne ce motif,
s’efforce à une synthèse :
– du dispositif normatif pénal ;
– du principe fondamental posé par la loi du 10 juillet 1991 de ce que les
interceptions de sécurité relèvent exclusivement de la police administrative, et en conséquence des actions de prévention, et non des démarches
actives préconisées par une partie de la doctrine née de l’intelligence
économique ;
– de la conciliation entre la protection de notre patrimoine scientifique et
économique et la nécessaire préservation de la « vie des affaires », protégée juridiquement dans une zone européenne où le libre-échange représente une valeur constitutive.
Ainsi la CNCIS retient les critères suivants : les interceptions de
sécurité sollicitées sous le motif « sauvegarde des éléments essentiels
du potentiel scientifique et économique de la France », doivent, d’une
part répondre à une menace (infraction issue du dispositif 411-1 à 411-11
du Code pénal) vérifiable traduisant une intention de nuire aux intérêts
d’une entreprise française, d’autre part, la personne dont il est demandé
d’intercepter les communications doit être clairement impliquée dans
cette menace. L’activité de l’entreprise menacée doit enfin être liée à
la défense de notre indépendance nationale au sens de l’article 5 de la
Constitution de la Ve République ou à la sécurité nationale.

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