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DEUXIÈME PARTIE : DES ENJEUX TECHNOLOGIQUES ET
JURISPRUDENTIELS MAJEURS POUR L’ACTIVITÉ DES SERVICES
DE RENSEIGNEMENT
Si les services de renseignement se sont bien approprié le cadre légal de la
loi du 24 juillet 2015, ils sont néanmoins confrontés à deux types d’enjeux.
Le premier enjeu est de nature technologique (I). En effet, si la loi a été
rédigée de façon à éviter son « obsolescence programmée », le texte reste
indéniablement axé sur l’usage de techniques et de ce fait, les évolutions
technologiques en cours – explosion de la quantité de données à traiter,
déploiement de la 5G, développement du chiffrement des communications,
développement des techniques de reconnaissance biométrique – ont sans conteste
un impact sur les méthodes de travail des services de renseignement que le
législateur ne peut s’abstenir de prendre en compte dans le cadre d’un bilan
législatif.
Parallèlement à ces enjeux d’ordre technologique, les services de
renseignement français opèrent dans un cadre juridique marqué non seulement par
l’évolution du droit national mais également par celle du droit international, et en
particulier de la jurisprudence européenne (II). Cet enjeu jurisprudentiel a une
double origine. D’une part, la Cour européenne des droits de l’homme a élaboré
depuis une quarantaine d’années une jurisprudence sur la surveillance qui, comme
dans d’autres domaines du droit, a des effets majeurs sur les législations
nationales. D’autre part, et le fait est beaucoup plus récent mais aussi beaucoup
plus préoccupant pour l’efficacité de l’action des services de renseignement, la
Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a choisi, à la fin de l’année 2016,
de se prononcer contre la conservation généralisée et indifférenciée des données
par les opérateurs de télécommunications. Cette décision de la CJUE pourrait
conduire à une remise en cause majeure de l’usage de nombreuses techniques de
renseignement par les services non seulement français mais de tous les États
membres de l’Union européenne.

I. PLUSIEURS ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES ONT DES
INCIDENCES SUR LE CADRE D’INTERVENTION DES SERVICES DE
RENSEIGNEMENT
Lors de ses auditions, la mission d’information a entendu plusieurs
directeurs de service insister sur le fait que la loi du 24 juillet 2015 était très
techno-centrée tandis que d’autres insistaient au contraire sur la plasticité d’un
texte technologiquement neutre.

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