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Ces deux cas, relevant de deux services différents, concernaient la
surveillance de personnes exerçant une profession ou un mandat protégés en
application des dispositions de l’article L. 821-7 du code de la sécurité intérieure.
Dans les deux cas, la CNCTR s’est aperçue, à l’occasion de l’instruction
de demandes de renouvellement de techniques de renseignement, que la cible
exerçait une profession ou un mandat protégés. L’exercice de ces professions ou
mandats, ignoré par le service lors de la première demande d’autorisation de
surveillance, avait par la suite été révélé par cette surveillance.
La CNCTR a estimé que la surveillance sollicitée ne pouvait être détachée
de l’exercice du mandat ou de la profession et elle a, en conséquence, émis un avis
défavorable au renouvellement des techniques sollicitées. Elle a, en outre, adressé
aux chefs des services demandeurs, à leur ministre de tutelle ainsi qu’au Premier
ministre, des recommandations d’interruption immédiate des surveillances en
cours et de destruction de tous les renseignements recueillis ainsi que de toutes les
transcriptions et extractions éventuellement réalisées. La CNCTR s’est assurée
que ces recommandations avaient été intégralement mises en œuvre.
La CNCTR peut saisir le Conseil d’État d’un recours si le Premier
ministre ne donne pas suite à ses avis ou recommandations ou que les suites qui y
sont données sont estimées insuffisantes. Cette situation ne s’est jamais produite.
La mission considère que la CNCTR remplit l’office qui lui a été fixé
par la loi – étant entendu que, comme son nom l’indique, il lui appartient de
contrôler « les techniques de renseignement » et non pas les activités de
renseignement. En particulier, elle n’est pas chargée d’un contrôle sur
l’opportunité de recourir à une technique de renseignement, qui reste du ressort de
l’exécutif. La mission ne préconise pas d’évolution du périmètre des missions de
la CNCTR.
2. La montée en puissance du contrôle parlementaire
a. La délégation parlementaire au renseignement
● Une institution récente
Le contrôle parlementaire des services de renseignement a longtemps été
un « serpent de mer » (1) qui s’est nourri de la contradiction entre l’existence du
« secret-défense » et l’aspiration de la représentation nationale à pouvoir appliquer
l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « la société a le
droit de demander compte à tout agent public de son administration. »
Comme le rappelait la présidente de la commission des Lois, Mme Yaël
Braun–Pivet dans un colloque organisé par l’Académie du renseignement, « la
(1) Roger Faligot, Jean Guisnel, Rémi Kauffer, Histoire politique des services secrets français, La Découverte,
Paris, 2012, p. 651.