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protection des données contre « tout accès » non autorisé que ces dispositions sont
« sans préjudice de la compétence des États membres pour réglementer la
conservation et l’accès aux données de connexion à des fins de lutte contre la
criminalité et de protection de la sécurité publique » (notamment article 5 de
l’actuelle proposition de règlement appelé à remplacer cette directive).
D’autre part, l’article 23, paragraphe 1, sous a) à e), du Règlement général
sur la protection des données autorise expressément le droit de l’Union ou le droit
national à apporter des limitations aux droits reconnus par ledit règlement en vue
de garantir la sécurité nationale, la défense nationale, la sécurité publique et la
prévention et la détection d’infractions pénales pourvu que ces limitations
respectent l’essence des libertés et droits fondamentaux ainsi que le principe de
proportionnalité. Ainsi, cet article, s’il permet des dérogations aux règles
générales de protection des données, ne soustrait pas pour autant lesdites
dérogations au droit de l’Union.
La CJUE pourrait donc considérer que cette disposition interdit également
toute conservation généralisée des données. Pour faire échec à cette
argumentation, il pourrait être avancé que la directive 2002/58 refondue, qui
exclurait la conservation des données du champ du droit de l’Union, est une lex
specialis qui fait obstacle à l’application de cette disposition, mais il n’est pas du
tout certain que cette interprétation soit acceptée par la Cour.
c. Modifier le droit primaire ?
La solution la plus radicale pour affranchir les services de renseignement
des effets de la jurisprudence Tele 2 Sverige AB consisterait à revenir sur le droit
primaire, c’est-à-dire à modifier le Traité, afin d’affirmer que les questions de
souveraineté et de sécurité nationale sont exclues du champ jurisprudentiel de la
CJUE.
Cette solution serait évidemment la plus efficace mais également la plus
complexe à mettre en application puisqu’elle devrait être décidée à l’unanimité et
que, à ce stade, tous les États membres de l’Union européenne ne semblent pas
prêts à s’engager dans une telle révision.
d. Une rébellion possible des juridictions nationales au nom du principe
d’identité constitutionnelle de la France ?
Une rébellion des juridictions nationales au nom du principe d’identité
constitutionnelle de la France ne semble pas à exclure. En effet, depuis 2004 et
dans plusieurs décisions depuis lors (1), le Conseil constitutionnel vérifie que
les textes de l’Union européenne ne remettent pas en cause « une règle ou un
(1) La décision n°2004-496 DC du 10 juin 2004, dite « Loi pour la confiance dans l'économie numérique » a
été confirmée et affinée dans les décisions n°2004-497 DC du 1er juillet 2004, n° 2004-498 DC du 29 juillet
2004 et n° 2004-499 DC du 29 juillet 2004.