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« meilleure pratique » – que le contrôle soit effectué par un juge, dans la mesure
où un tel contrôle présente les meilleures garanties d’indépendance et
d’impartialité. Cependant, une autorisation préalable n’est pas nécessaire dès lors
qu’il existe un organe de contrôle indépendant.
La CEDH considère que le droit britannique ne répond pas à l’exigence de
« qualité de la loi » et ne permet pas de conserver l’« ingérence » au niveau
« nécessaire dans une société démocratique ». La Cour considère en effet qu’il y a
insuffisance de la surveillance appliquée au choix des canaux de transmission pour
l’interception, au filtrage, à la recherche et à la sélection des communications
interceptées pour examen à raison du caractère inadéquat des garanties liées à la
sélection des « données de communication pertinentes » pour examen (1). Partant,
la CEDH considère qu’il y a eu violation de l’article 8 de la Convention,
s’agissant de l’interception massive de communications.
Si l’on s’en tient à son premier volet consacré à l’interception massive des
communications, cet arrêt s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence de la
Cour et notamment dans celle l’arrêt Zakharov c Russie précité. Dans l’arrêt Big
Brother Watch, la CEDH a rejeté la demande des requérants d’actualiser les
six critères énoncés dans sa jurisprudence constante, à la lumière de l’avancée des
technologies de surveillance. La Cour considère qu’ajouter le critère de
« suspicion légitime » à l’encontre de la personne objet de la mesure, et celui de
notification subséquente à la personne objet de l’interception serait incompatible
avec le principe même de surveillance de masse. L’arrêt Big Brother Watch est
aussi à rapprocher de l’arrêt Centrum for Rattvisa c Suède du 19 juin 2018. Dans
cet arrêt, la Cour considère que la législation suédoise d’interception massive de
signaux électroniques aux fins du renseignement étranger est compatible avec
l’article 8 de la Convention.
b. L’obtention de données de communication auprès de fournisseurs de
services de communication
Dans l’arrêt Big Brother Watch, la CEDH indique que le système
britannique d’obtention de données de communication auprès de fournisseurs de
(1) « La Cour considère que la décision de mettre en œuvre un régime d’interceptions en masse relève de
l’ample marge d’appréciation laissée à l’État contractant. De plus, compte tenu de la supervision
indépendante exercée par le Commissaire à l’interception des communications et l’IPT, et des vastes
enquêtes indépendantes qui ont suivi les révélations d’Edward Snowden, elle estime que les services de
renseignement du Royaume-Uni prennent au sérieux les obligations que leur impose la Convention et
n’abusent pas des pouvoirs que leur confère l’article 8 § 4 de la RIPA. Néanmoins, l’examen de ces
pouvoirs soulève deux principaux points de préoccupation : premièrement, le fait que le processus de
sélection ne fait pas l’objet d’une supervision d’ensemble, portant aussi sur la sélection des canaux de
transmission sur lesquels l’interception aura lieu, les sélecteurs et les critères de recherche à appliquer pour
le filtrage des communications interceptées et la sélection des éléments pour examen par un analyste ; et
deuxièmement, l’absence de garanties réelles applicables à la sélection pour examen de données de
communication associées. Au vu de ces lacunes et dans la mesure indiquée ci-dessus, la Cour conclut que le
régime découlant de l’article 8 § 4 de la RIPA ne répond pas à l’exigence de " qualité de la loi " et ne
permet pas de conserver l’" ingérence " au niveau " nécessaire dans une société démocratique ". Partant, il y
a eu violation de l’article 8 de la Convention à cet égard. »