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La sécurité, qui est à la fois française et européenne, suppose la réciprocité
avec nos alliés, car la loi sur le renseignement ne concerne pas uniquement le
terrorisme. Le projet de loi est-il compatible avec les engagements qui nous lient à
nos alliés ? Vise-t-elle les citoyens ou diplomates des nations amies, sur le
territoire français ou étranger ? Des engagements réciproques, à l’instar de ceux
qui lient Israël aux États-Unis, prévoient-ils l’échange de renseignements avec
celles-ci ? Qu’en est-il du renseignement économique ? Alors que le pillage de nos
brevets et de nos secrets d’invention nous cause un grave préjudice, jusqu’où peut
aller la protection qu’assure l’action offensive des services de renseignement ?
Le projet détermine les contrôles avec précision. Pourra-t-on utiliser le
référé-liberté dans le délai de quarante-huit heures qu’applique le juge
administratif, lequel est, en l’espèce, le juge des libertés ? Le contrôle de la mise
en œuvre peut-il être confié à la commission des Lois ou à son bureau, comme
l’avait envisagé Clemenceau en 1918 ? Peut-on attribuer un rôle à notre
commission au lieu d’impliquer seulement la délégation parlementaire au
renseignement ?
Enfin, quel est le budget prévu ? De quels montants disposeront les fonds
spéciaux ? En 2001, j’avais plaidé pour leur disparition. De ce fait, leur utilisation
par le Gouvernement a été supprimée, mais non celle que peuvent en faire les
services. De quelle somme ceux-ci disposeront-ils et comment sera-t-elle
budgétée ?
M. Alain Chrétien. Je vous remercie de m’accueillir dans votre
commission. Celle de la défense a eu l’occasion d’auditionner des responsables
des services du renseignement. Le rapporteur dit volontiers qu’en France, on
pêche à la ligne et non au chalut. Grâce aux articles L. 851-3 et L. 851-4, un petit
chalut va se mettre en place.
Nos interlocuteurs ont souvent indiqué qu’ils dépendaient de la National
Security Agency (NSA). Le texte renforcera donc notre souveraineté nationale. Le
groupe UMP n’est pas défavorable à l’utilisation de dispositifs techniques
permettant de recueillir un grand nombre d’informations – quitte à prévoir un
contrôle rigoureux.
J’en viens à ma question, qui complétera celle de M. Tourret : les
dispositions visant au renforcement et à la légalisation des pratiques d’écoute et
d’interception s’appliquent-elles seulement aux ressortissants français sur le
territoire national ? En d’autres termes, des personnes étrangères sur un territoire
étranger pourront-elles se prévaloir de ce régime juridique ?
M. Pascal Popelin. Nous engageons l’examen du texte avec une certaine
gravité. Pour la première fois, la France consacre un projet de loi au
renseignement, univers que nos concitoyens connaissent peu, ce qui nourrit bien
des fantasmes. Les Français évoquent avec méfiance leurs « services secrets »,