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en 1987 a permis au juge administratif d’étendre et d’approfondir son contrôle à
l’égard des actes de l’administration et ce, dans un respect croissant des droits et
libertés des citoyens. À tel point que, comme l’affirmait en 1929 Gaston Jèze (1), le
recours pour excès de pouvoir peut aujourd’hui apparaître comme l’arme la plus
efficace en faveur des libertés. La construction de l’Europe des droits de l’homme
avec la Convention du 4 novembre 1950, ratifiée par la France en 1974, n’est pas
non plus étrangère à ce mouvement…
C. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DÉPOSÉ À
L’ASSEMBLÉE NATIONALE
1. La mise en place d’un régime d’autorisation sous un double contrôle
administratif et juridictionnel
L’article 1er du projet de loi crée, dans le code de la sécurité intérieure, un
nouveau livre VIII intitulé « Du renseignement », comprenant cinq titres.
Le titre Ier détermine les principes et les finalités du renseignement. Il pose
en particulier le principe du respect de la vie privée, auquel il ne peut être porté
atteinte que dans les seuls cas de nécessité d’intérêt public prévus par la loi et dans
le respect du principe de proportionnalité. Il énonce les missions des services
spécialisés de renseignement ainsi que les sept grandes catégories de finalités que
peuvent poursuivre les techniques de renseignement.
Le titre II crée, dans un premier chapitre, un nouveau régime
d’autorisation administrative applicable, sauf exceptions, à l’ensemble des
techniques de recueil de renseignement. Celles-ci ne peuvent être mises en œuvre
que sur autorisation du Premier ministre, après avis d’une autorité administrative
indépendante, la Commission nationale de contrôle des techniques de
renseignement (CNCTR). Un mécanisme d’urgence absolue permet de se
dispenser de cet avis préalable. La commission peut également émettre des
recommandations. Dans un second chapitre, le titre II traite des modes et des
durées de conservation des données, ainsi que de leur accessibilité, de leur
centralisation et des conditions de leur exploitation.
Le titre III prévoit la création de la Commission nationale de contrôle des
techniques de renseignement, chargée d’assurer un contrôle administratif externe
sur la mise en œuvre des techniques de renseignement. Il fixe sa composition, ses
règles de fonctionnement, ses missions, ses pouvoirs ainsi que les règles de
déontologie et d’incompatibilité applicables à ses membres.
Le titre IV donne compétence au Conseil d’État pour exercer un contrôle
juridictionnel renforcé de la mise en œuvre des techniques de renseignement, sur
saisine de la commission ou de toute personne justifiant d’un intérêt direct et
personnel, ou encore sur renvoi préjudiciel émanant d’une autre juridiction.
(1) In Les libertés individuelles, Annuaire de l’Institut international de droit public, 1929, p. 180.