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Par rapport au droit en vigueur, l’étude d’impact du présent projet de loi
insiste sur le fait que le citoyen pourra saisir le Conseil d’État d’un simple
« soupçon » d’illégalité de la mise en œuvre d’une technique de recueil de
renseignement alors que l’article R. 421-1 du code de justice administrative en
vigueur précise que le juge administratif ne peut être saisi que d’une décision
administrative. Or, le citoyen a rarement connaissance de la décision
administrative autorisant les services de renseignement à mettre en œuvre une
technique de renseignement à son égard. Il en résulte que la possibilité d’exercer
un recours sur la base d’un simple soupçon constituerait une garantie nouvelle
pour les citoyens. Reste néanmoins à savoir de quelle manière le Conseil d’État
appréciera la condition d’intérêt « direct et personnel » à agir de la part d’un
citoyen qui, par définition, n’est pas censé connaître la mise en œuvre d’une
technique de recueil de renseignement à son égard.
La saisine du Conseil d’État n’est enfermée dans aucun délai ni
formalisme particulier si ce n’est la saisine préalable de la CNCTR. Si cette
démarche doit permettre de « mettre en état » les recours déposés devant le
Conseil d’État, il ne s’agit que d’une simple formalité, le citoyen n’ayant qu’à
justifier de cette saisine préalable avant de pouvoir exercer son recours devant le
Conseil d’État.
b. Un recours ouvert à la CNCTR selon deux modalités distinctes
Le 2° de l’article 841-1 du code de la sécurité intérieure permet à la
CNCTR de saisir d’office le Conseil d’État dans deux hypothèses :
– à la majorité de ses membres, si elle estime que l’autorisation accordée
ou la technique de recueil de renseignement mise en œuvre n’est pas conforme
aux dispositions du présent projet de loi et que la recommandation qu’elle a
adressée au Premier ministre ou au service de renseignement concerné n’a pas été
suivie d’effet ou que les suites qui y ont été données sont insuffisantes
(conformément au dernier alinéa de l’article L. 821-6 du code de la sécurité
intérieure) ;
– à la demande de deux de ses membres, lorsque la technique de recueil de
renseignement en cause s’accompagne d’une intrusion dans un lieu privé à usage
d’habitation ou dans un système de traitement automatisé de données à laquelle
elle avait donné un avis défavorable ou lorsque le Premier ministre n’a pas donné
suite à ses recommandations dans ce cadre (article L. 853-2 (nouveau) du code de
la sécurité intérieure introduit par l’article 3 du projet de loi).
7. La saisine à titre préjudiciel du Conseil d’État par les juridictions ou le
procureur de la République
Le dernier alinéa de l’article 841-1 du code de la sécurité intérieure
permet à toute juridiction administrative ou autorité judiciaire de saisir le Conseil
d’État à titre préjudiciel, lorsque la solution du litige dont elle est saisie dépend de