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interceptions de correspondances émises par la voie des communications
électroniques ayant pour objet de rechercher des renseignements intéressant la
sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et
économique de la France, ou la prévention du terrorisme, de la criminalité et de la
délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de groupements
dissous en application de l’article L. 212-1 ».
Dans les faits, le Premier ministre, sur la base d’une demande écrite et
motivée émanant d’un des ministères dont dépendent les six services de
renseignement, accorde l’autorisation d’exécuter une écoute téléphonique.
Préalablement, il doit solliciter l’avis de la CNCIS. Et une fois l’autorisation
délivrée, c’est le GIC qui procède à l’écoute.
Si la procédure est assez simple, le champ d’investigation est, en pratique,
limité puisque le législateur a souhaité éviter tout usage abusif. Ainsi, les
interceptions doivent-elles répondre à l’un des cinq motifs figurant dans la loi et sur
lesquels la CNCIS exerce un contrôle minutieux. Par exemple, lorsque la sécurité
nationale est invoquée, la personne visée par l’écoute doit elle-même, par ses
agissements, constituer ou concourir à une menace directe ou indirecte, actuelle ou
future, contre celle-ci. Il ne saurait être question de violer la vie privée d’une
personne qui, ne portant nullement atteinte à la sécurité nationale, disposerait
d’informations potentiellement utiles pour les services de renseignement.
La même extrême prudence s’impose lorsque le motif de prévention du
terrorisme est avancé. Dans ce domaine, la définition retenue par la CNCIS est
celle du droit pénal : la commission intentionnelle d’actes en relation avec une
entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre
public par l’intimidation ou la terreur. Dès lors, la surveillance de mouvements
extrémistes ne relève pas nécessairement de la prévention du terrorisme. Comme
l’indique la CNCIS dans son 20e rapport, « le prosélytisme religieux, comme
l’expression d’opinions extrêmes, dès lors qu’elles ne tombent pas sous le coup de
la loi, ne justifient pas, en tant que tels, une demande d’interception, s’ils ne
comportent aucune menace immédiate pour l’ordre public républicain,
matérialisée par exemple par un appel ou un encouragement à la violence »78.
Pour cette autorité administrative indépendante, la motivation de la
demande doit répondre à trois critères : elle doit être suffisante, pertinente et
sincère. Le service doit ainsi identifier précisément la cible et son implication
personnelle dans des agissements en rapport avec le motif avancé. Il s’agit alors de
permettre à la CNCIS d’évaluer la proportionnalité entre l’atteinte projetée à la vie
privée et la gravité de la menace. Le respect de ce principe la conduit d’ailleurs à
exclure des transcriptions résultant de l’interception de sécurité certaines parties
strictement privées des conversations. La Commission vérifie également que la
demande ne poursuit pas d’autres buts que celui de la prévention.
78
20e rapport de la CNCIS, Paris, La Documentation française, 2012, p. 52.