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Néanmoins, en dépit de ce cadre, la CNCIS a bénéficié dès son entrée en
fonction en 1991 de la bienveillance du Premier ministre. Edith Cresson a en effet
accepté que le contrôle a posteriori prévu par la loi se mue en avis de mise en
œuvre ex ante (sans pour autant entamer les capacités de contrôle ex post). Cette
pratique a été ensuite confirmée officiellement par une directive en date du 18
février 2008 signée par M. François Fillon, alors chef du Gouvernement. Le
document présente cette coutume comme « la mieux à même de répondre à
l’objectif de protection efficace des libertés poursuivi par le législateur ».
Grâce à une méthodologie maintenant bien établie, la CNCIS a acquis une
expertise particulière qui respecte scrupuleusement la lettre constitutionnelle mais
également l’exigeante jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme
(CEDH). En conséquence, aucune raison n’expliquerait qu’une loi opte pour une
nouvelle structure pour délivrer des avis ex ante et effectuer des contrôles ex post
[proposition n° 8]. D’ailleurs, le Conseil d’État, dans son dernier rapport public
thématique s’inscrit dans cette même logique75.
En revanche, la Délégation insiste fortement sur la nécessité d’accroître
considérablement les moyens humains, techniques et budgétaires de la future AAI
afin de répondre pleinement tant à l’évolution technologique qu’à l’accroissement
des techniques de recueil du renseignement soumises à autorisation76 [proposition
n° 9].
Une question demeure concernant la composition de l’AAI qui accueille
aujourd’hui deux parlementaires et un haut fonctionnaire (conseiller d’État ou
magistrat de la Cour de cassation). Pour la DPR, la nécessaire revalorisation des
moyens humains, techniques et budgétaire évoquée ci-avant doit également
présider à un accroissement des membres de la structure dans la perspective d’un
travail à plein temps [proposition n° 10]. Ainsi, semblerait-il pertinent d’élargir le
nombre de hauts fonctionnaires (issus du Conseil d’État, de la Cour de cassation et
de la Cour des comptes) dans l’objectif d’associer des compétences variées.
De même, la présence des parlementaires a suscité des interrogations au
sein de la Délégation. Dans les faits, le président de la CNCIS effectue l’essentiel
du travail, seuls les cas litigieux étant soumis aux élus de la Nation dans le cadre de
la formation plénière. Cette situation souligne le fait que l’activité de contrôle
constitue une tâche à plein temps qui requiert un haut degré de technicité.
De surcroît, dans la mesure où la philosophie du contrôle parlementaire a
été précisée par la LPM et que les pouvoirs de la DPR ont été considérablement
étendus, la présence des parlementaires dans une structure externe pourrait ne plus
présenter un intérêt majeur. Il semblerait même que le Conseil d’État, lors de
75

Conseil d’État, Le numérique et les droits fondamentaux, étude annuelle 2014, Paris, La Documentation
française, 2014, p. 30, proposition n°41.
76
Il s’agit d’ailleurs d’une demande récurrente que la CNCIS formule dans ses rapports d’activité publiés
chaque année.

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