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SMS sont lus et enregistrés, que les services de renseignement bafouent les lois et
multiplient les intrusions dans leur vie privée. La multiplication d’articles de presse
(cf. infra) affirmant que la DGSE notamment travaillait dans l’illégalité et sans
aucun contrôle a probablement contribué à nourrir cette inquiétude. La DPR espère
que le présent rapport apportera les indispensables démentis que de telles
allégations méritent. Nos services ne sont ni « secrets » ni « spéciaux ». Ces
expressions ambiguës masquent une réalité plus prosaïque : ils sont « une part
consubstantielle d’un pouvoir démocratique143 » dont la vocation est de concourir à
la sécurité de notre pays et de ceux qui y résident.
De même, l’affaire Snowden doit permettre une réelle prise de conscience
de la dangerosité potentielle des grandes entreprises de l’internet, *** par
exemple. L’accumulation gigantesque des données privées concernant leurs clients
dont la commercialisation (habilement présentée comme une inévitable contrepartie
de la gratuité d’internet) ne peut laisser la puissance publique indifférente. Il faut
que les opinions publiques comprennent que le principal facteur d’aliénation de la
liberté individuelle réside dans l’abandon des données consenti par chacun. Et pour
la DPR, ce risque est bien plus dangereux pour le citoyen que l’activité exercée par
les services de renseignement. L’absence de régulation de l’internet tourne en la
défaveur de l’internaute globalement dépourvu de réflexes d’hygiène
informatique. La révolution à opérer en ce domaine est aussi importante que
l’adoption des règles de l’asepsie après les découvertes de Pasteur. À la différence
que les changements de mentalité doivent intervenir en un laps de temps infiniment
plus court. Le citoyen ne peut choisir de volontairement se promener « nu » sur des
autoroutes commercialisées sur internet et réclamer au législateur national de lui
garantir le total et absolu respect de sa vie privée.
De tels constats n’exonèrent en rien les pouvoirs publics de leur
obligation de structurer leurs capacités de cyberdéfense et de sensibilisation.
Ainsi par exemple, il n’est pas acceptable que le ministère de l’Intérieur ait tant
tardé à désigner son référent cybersécurité144 et à coordonner l’action des nombreux
services compétents. Les entreprises comme les particuliers ont besoin d’un point
d’entrée unique pour de meilleures capacités de suivi des dossiers. L’heure ne peut
être à la dispersion des moyens étatiques. Les États ne peuvent laisser les
consommateurs désarmés face aux armées d’avocats des géants de l’internet ou
face aux moyens des cybercriminels.
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En définitive, les révélations de M. Edward Snowden auront joué le rôle de
révélateur de pratiques dont la connaissance était restreinte à un petit cercle
143
144

Claude Silberzahn, op. cit., p. 10.
Le préfet Jean-Yves Latournerie n’a été désigné qu’à l’occasion du conseil des ministres du 4 décembre
2014.

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