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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

Sur le plan opérationnel, le prosélytisme, le financement, la
provocation et l’apologie du terrorisme sont étroitement surveillés. Il en va de
même pour les combattants qui reviennent, pour les jeunes qui veulent partir.
Nous portons une attention particulière aux prisons, comme à tous les lieux où
pourrait se produire la radicalisation. Des réseaux de recrutement sont
démantelés par la police. Enfin, comme en France, au Royaume-Uni, en
Allemagne et en Belgique, notre ministère de l’intérieur étudie depuis deux ans
d’éventuelles réformes du code pénal, du code de procédure pénale, de la loi
sur le séjour des étrangers, du code civil.
Mme Anne Dorte Riggelsen, ambassadeur du Danemark en
France. – Merci de m’avoir invitée à cette table ronde. Mon discours sera
atypique car nous vivons des journées atypiques. Je suis profondément
reconnaissante et émue face à la solidarité de la France envers le Danemark,
après les attentats terroristes de ce weekend. Votre ambassadeur M. François
Zimeray, présent au centre culturel où la première fusillade a eu lieu, est un
ardent défenseur de la société danoise. Venu à vélo, il a dû repartir en voiture
blindée. Mais il a eu ce message magnifique : restez sur vos vélos, nous a-t-il dit,
conservez votre société ouverte et démocratique.
Les jours à venir seront difficiles : nous devons essayer de
comprendre ce qui est arrivé. La police travaille toujours pour faire avancer
l’enquête. Nous devons nous efforcer de continuer à vivre comme par le passé,
même si nous découvrons que de nombreux Danois sont tentés par la cause
djihadiste. Les terroristes doivent naturellement être punis mais certains
peuvent sans doute être également sauvés. Le gouvernement danois tend la
main à ceux qui s’engagent sur le mauvais chemin. Il leur offre le moyen de
revenir dans notre société.
Comme vous l’avez lu dans la presse française il y a quelques
semaines, la ville danoise Aarhus a, depuis 2007, lancé un dispositif pionnier
pour prévenir la radicalisation. Il ne s’agit pas d’un remède miracle mais il a fait
ses preuves dans cette ville de 300 000 habitants.
Nous devons nous interroger sur le paradoxe danois : notre politique
d’intégration est ambitieuse, notre système répressif efficace, notre économie
florissante, avec un taux de chômage, même chez les jeunes, très bas. Or, nous
avons connu une crise majeure lors de la publication des caricatures en 2005 et
notre pays fournit le troisième plus important contingent de combattants en
Europe, en pourcentage de la population. Pourquoi ? Je vais tenter de répondre
à titre individuel à cette question.
Le Danemark est un pays extrêmement libéral, au sens
philosophique et non politicien du terme. Notre Constitution s’apparente plus à
un texte poétique que juridique. En comparaison de la plupart des autres pays,
nous avons peu de lois, qui se bornent à tracer les grandes lignes… sauf
lorsqu’il s’agit de transposer la réglementation européenne ! Au Danemark,
quasiment tout est permis. On a le droit d’être nazi, fondamentaliste et même

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