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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE
aux douze premières propositions, elles visent à prévenir la radicalisation. Le
financement des aumôniers est également dans le rapport…
Mme Esther Benbassa. – Mais elles ne sont pas mises en évidence…
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. – J’ai eu à cœur de rendre compte
de tout ce que nous avons vu et entendu. Il est faux d’affirmer que le volet
prévention a été oublié. Il est facile de déclarer qu’il faut traiter les causes et que
c’est ainsi que nous résoudrons le problème. Méfions-nous de cette vision
mécaniste. Je veux bien que nous consacrions de longues pages au décrochage
scolaire, mais tous les jeunes en décrochage scolaire ne se radicalisent pas.
Certains envoient des dizaines de CV sans trouver d’emploi : ce n’est pas pour
cela qu’ils se radicalisent. On pourrait parler aussi de la misère ou des quartiers.
Évidemment je suis contre la misère ou les conditions de vie difficiles, mais ce
qui manque c’est le lien de causalité. Il suffit de regarder au cas par cas. Voyez
ce jeune Normand qui s’est radicalisé seul dans son village devant Internet,
sujet que personne d’ailleurs n’a soulevé… Il est certain que les maux de notre
société facilitent la radicalisation, mais ce rapport ne peut pas tous les traiter. Le
djihadisme est un mécanisme difficile à cerner. Tous les cas de figure sont
existent. On a prétendu qu’il touchait des personnes illettrées, or certains
djihadistes sont des étudiants, ont des diplômes du supérieur. En la matière, il
faut faire preuve d’humilité.
Dans le prolongement des attentats de janvier, le gouvernement a
annoncé plusieurs mesures. Il m’est apparu dès lors que notre travail se devait
d’être modeste. Inutile d’ajouter des considérations générales sur le djihadisme,
les journaux en regorgent déjà ! J’ai préféré les propositions conformes à notre
rôle de législateurs. L’intérêt de ce rapport réside justement dans ces 30 ou
40 propositions techniques. Certes, modifier tel article de loi ne constituera pas
un scoop pour les médias, mais tel n’est pas notre objectif ! L’essentiel est d’être
utile – je pense au renseignement. Tirant les leçons de notre déplacement à
Fleury-Mérogis, je me prononce pour l’isolement des djihadistes, non par
groupes de 30 ou 40, mais par groupes plus restreints de 15, sinon les
surveillants ne maîtriseront plus rien.
Enfin, monsieur Raynal, pour formuler nos recommandations sur les
moyens, nous nous sommes appuyés sur les effectifs existants. Le nombre de
personnes affectées au renseignement pénitentiaire est insuffisant. Donnonsnous les moyens de prévenir la radicalisation en prison. De même, trop peu
d’agents ont pour mission de lutter contre le financement du terrorisme au sein
de Tracfin. Nous proposons parfois de tripler les effectifs, mais si nous ne
tablons pas du poing sur la table, il ne se passera rien !
Mme Nathalie Goulet, présidente. – L’amendement n° 118 concerne
l’intitulé du rapport. Je propose que nous l’examinions en dernier.
L’amendement n° 118 est réservé.
L’amendement rédactionnel n° 29 est adopté.