Études et documents
Art. 411-8 – Le fait d’exercer, pour le compte d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger
ou de leurs agents, une activité ayant pour but l’obtention ou la livraison de
dispositifs, renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers dont l’exploitation, la divulgation ou la réunion est de
nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation est puni de
dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende. »
Toute forme d’espionnage y compris économique comme le transfert
illicite de technologie est clairement incriminée par ces articles : est en effet
visée, notamment, la fourniture de procédés.
Cette fourniture peut être le fait d’auteurs divers (ingénieurs, agents
de renseignement de pays tiers, « honorables correspondants », officines
« spécialisées » dans l’espionnage économique) et être destinée non seulement à des services de renseignements de pays tiers (« puissances étrangères ») mais également à des entreprises 1 ou organisations étrangères.
Un exemple, bien évidemment déconnecté de toute actualité, permettra de mieux illustrer la légitimité d’une demande d’interception de
sécurité formulée dans un contexte d’espionnage économique.
Une personne est suspectée de recueillir en vue de leur transfert illicite des secrets de fabrication d’un groupe français leader mondial dans sa
spécialité.
Le transfert illicite d’un secret de fabrication à une entité étrangère
permet d’établir la réunion de plusieurs éléments constitutifs des délits de
l’art. 411-7 du Code pénal (on peut d’ailleurs noter que « la communication
de secret de fabrique » était déjà incriminée par l’ancien article 418).
Ce transfert illicite d’un procédé de fabrication, détenu exclusivement
par un groupe national leader dans sa spécialité, est bien de nature à porter
gravement atteinte aux éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France. Il constitue sans aucun doute une atteinte aux intérêts
fondamentaux de la nation. Les éléments constitutifs d’une suspicion de
commission du délit visé à l’art. 411-7 du Code pénal, dont on remarquera
qu’il constitue un mode original de répression de la tentative (le recueil des
informations sans livraison de celles-ci est en soi punissable comme l’est le
faux en écriture, acte préparatoire d’une éventuelle escroquerie), sont réunis et l’interception de sécurité parfaitement fondée en droit.
Il résulte de ce qui précède que la sauvegarde des éléments essentiels
du potentiel scientifique et économique de la nation suppose une suspicion
d’atteinte à ce potentiel, une menace, et que la cible dont on se propose
d’écouter les communications soit impliquée dans cette menace.
1) Le terme entreprise étant ici entendu non au sens « d’entreprise terroriste » comme dans
l’art. 421-1 du Code pénal, mais bien au sens du droit commercial du droit du travail et de
l’économie politique à savoir la réunion des facteurs de production du capital et du travail
nécessaires à la mise en œuvre d’une activité professionnelle déterminée.
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