— 104 —
V. — Lattre à M. le Président da la République.
SENAT
CONINUSSION DE CONTRôLE
DES SERVICES ADMINISTRATIFS
PROCÉDANT
AUX ECOUTES TÉLÉPHONIQUES
Paris, le 12 septembre 19'13.
Le Président.
Monsieur le PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
Palais de l'Elysée. Paris.
Monsieur le Président de la République,
Le Sénat, au cours de sa séance du 29 juin 1973, a créé, conformément à l'article 6
de l'ordonnance du 7 janvier 1958 et à l'article 11 du Règlement du Sénat, une
Commission de Contrôle des Services administratifs procédant aux Ecoutes téléphoniques.
La création d'une telle Commission qui peut, selon l'article 6, alinéa 3, de l'ordonnance susvisée, « examiner la gestion administrative, financière et technique des
services publics », devait permettre au Sénat de contrôler le fonctionnement des
services effectuant des écoutes au triple point de vue administratif, financier et
technique. Sur ce dernier point, il lui appartient de vérifier que le fonctionnement
de ces services présente toutes garanties quant au respect des libertés fondamentales
et que nul ne peut recourir abusivement à la pratique des écoutes téléphoniques, ni
faire mauvais usage des rensei,gnements ainsi obtenus.
Mais la Commission de Contrôle ne peut remplir sa mission légale que dans la
mesure où il lui est possible d'examiner les documents administratifs, financiers ou
comptables relatifs à ces services et de procéder à toutes les auditions nécessaires.
Or, M. le Premier Ministre s'est opposé fermement aux demandes de la Commission,
faisant ainsi délibérément obstacle à l'exercice des pouvoirs de contrôle du Parlement.
Pour justifier sa décision, M. le Premier Ministre a invoqué l'oblieation où il se
trouvait de préserver les secrets de la Défense nationale.
Cette explication ne saurait en aucune manière nous satisfaire et, puisqu'aux
termes de l'article 5 de la Constitution, vous ètes chargé d'assurer le fonctionnement
régulier des pouvoirs publics, dont une Commission de Contrôle parlementaire est
partie intégrante, c'est à votre haute autorité que nous nous adressons afin que nous
puissions accomplir la tâche que le Sénat nous a confiée.
Nous vous faisons respectueusement observer que les écoutes existent, que leur
fonctionnement est assuré sur le budget de l'Etat et que nous sommes responsables
de ce dernier comme aussi de toutes atteintes à la vie privée et aux libertés fondamentales.
Nous sommes également responsables de la Défense nationale, puisque c'est la
loi qui en détermine l'organisation générale et fixe les règles concernant les sujétions
qu'elle impose aux citoyens (art. 34 de la Constitution). C'est le Parlement, enfin, qui
autorise la déclaration de guerre (art. 35).