hésité à employer à propos de certaines de ces autorités la
formule ambiguë de « magistratures du secret » 3.
Ce juge du secret pourrait être directement saisi par les juridictions et serait en mesure de communiquer avec elles (dans le
respect de la confidentialité nécessaire), ce qui – sauf exception – n’est pas le cas aujourd’hui. Cela lèverait notamment la
suspicion qui demeure du fait de l’interposition nécessaire du
ministre et faciliterait la précision des investigations que l’autorité de contrôle doit effectuer pour répondre aux demandes
des juges.
Ses décisions seraient de jure (et non plus de facto) obligatoires
pour l’administration et seraient formellement motivées (alors
qu’aujourd’hui, la CCSDN ne fait aucune distinction entre le
sens de l’avis qui est publié – sans motivation – et l’avis en
lui-même).
Une telle instance pourrait également s’avérer très utile dans le
contexte créé par les nouvelles lois antiterroristes et de sécurité
qui permettent désormais de recourir à des moyens de preuve
partiellement secrets (comme des témoignages anonymes
d’agents infiltrés ou de témoins protégés 4, ou des décryptements réalisés grâce au recours à des « moyens couverts par le
secret de la défense nationale » 5). Dans de telles situations, on
pourrait imaginer que le juge du secret puisse intervenir pour
garantir le caractère équitable des procédures sans porter
atteinte à la confidentialité de ces enquêtes ou de certaines
sources.
Enfin, l’intervention de ce juge pourrait mettre un terme à une
situation jusqu’ici tolérée par notre droit pénal – mais qui n’en
3. Conseil d’État, Rapport public 1995, La Documentation française, 1996, p. 143.
4. Nouveaux articles 706-86 et 706-87 du Code de procédure pénale (créés par la loi
Perben II du 9 mars 2004) concernant le témoignage des officiers de police infiltrés et
les articles 706-57 à 706-63 CPP concernant la protection des témoins (créés par la loi
sur la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001). Sur l’ensemble de cette
problématique, cf. Bertrand Warusfel, « La situation des agents infiltrés et des
informateurs de police : une sortie progressive de l’opacité ? », Droit & Défense,
2003/4, pp. 33-38.
5. Articles 230-1 à 230-5 Code de procédure pénale (également créés par la loi du
15 novembre 2001).
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