Chapitre III

Une Commission nationale de l’Informatique et
des Libertés, pour quelle société ?

Après dix huit mois d’activité et au terme de son premier rapport, la
Commission nationale de l’Informatique et des Libertés se doit d’exprimer son
sentiment sur le phénomène informatique. La loi et son décret d’application lui
fixent en effet des objectifs qui dépassent largement le contrôle des
informations nominatives. Ils lui confient un rôle de réflexion générale quant
aux effets de l’utilisation de l’informatique sur le droit à la protection de la vie
privée, l’exercice des libertés et le fonctionnement des institutions
démocratiques.
Ce rôle conduit ses membres à porter des appréciations où l’intuition et
l’intime conviction se substituent parfois aux raisonnements logiques ou
juridiques. Leur ambition est de réagir le plus sainement possible et d’être en ce
domaine la « conscience sociale de la nation ». La collégialité corrige, s’il en est
besoin, les excès de la logique ou ceux de l’émotion.
Il est encore trop tôt pour que la Commission puisse faire état d’une
opinion globale sur les conséquences de l’informatisation de la société
française, à propos de laquelle il existe plus de prévisions que de constats. Il lui
sera plus facile de le faire lorsqu’elle aura le recul nécessaire et lorsqu’après
avoir reçu la totalité des déclarations de traitement, elle saura vraiment « qui
sait quoi » et « pourquoi » ?.
Les observations qu’elle peut dès maintenant formuler sont relatives aux
premiers effets de la loi, aux problèmes qui subsistent et aux interrogations que
pose l’avenir.
LES PREMIERS EFFETS DE LA LOI
La loi du 6 janvier 1978 est intervenue au moment opportun, au moment
seuil, celui de l’explosion de l’informatique qui commence à pénétrer en
profondeur dans la vie du plus grand nombre, le phénomène étant amplifié par
le « miracle » des télécommunications.
Les utilisateurs étaient et sont encore animés de la volonté d’obtenir de
l’outil dont ils disposent, la plus grande efficacité. Il fallait des limites à leur
action. On peut penser que sans une loi, qu’ils sont maintenant désireux de
respecter, beaucoup d’entre eux ne se seraient imposés aucune frontière. De
très bonne foi, ils pouvaient croire que la fin justifiait les moyens.
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