Avis et préconisations de la Commission

biens. La Commission a toujours rappelé qu’il ne suffit pas d’invoquer
la crainte générale d’un trouble à l’ordre public, comme y expose plus
ou moins toute manifestation, pour répondre aux exigences de motivation résultant de la loi. Pour ce faire, il doit être justifié, avec la précision
nécessaire, d’une menace particulièrement grave à la sécurité nationale.
Ainsi des demandes motivées par la crainte d’un trouble à l’ordre
public ne peuvent fonder le recours à une interception qu’en cas de
menace particulièrement grave à la sécurité. Le risque d’attenter à la
forme républicaine des institutions ou de déboucher sur un mouvement
insurrectionnel est fondamental. Si des manifestations sont susceptibles de dégénérer, le droit de manifester étant constitutionnellement
reconnu, il s’agit là, d’un problème d’ordre public et non d’une atteinte
à la sécurité nationale. On peut cependant admettre que dans certaines
hypothèses, l’ampleur des troubles ou les atteintes aux institutions voulues par leurs auteurs affectant le lieu et le temps des manifestations, la
qualité des autorités ou des symboles républicains visés, sont tels que la
sécurité nationale peut être menacée.
Les interceptions de sécurité ne sauraient être utilisées comme
moyen de pénétrer un milieu syndical ou politique ou de pratiquer la
surveillance d’opposants étrangers, si la sécurité de l’État français luimême n’est pas en cause. S’agissant de la recherche de renseignements,
la personne dont il est envisagé d’intercepter les correspondances doit
être suspectée d’attenter par ses agissements personnels aux intérêts
fondamentaux de la Nation. Si les services de renseignements ont, par
nature, une mission de collecte de renseignements qu’ils remplissent
en utilisant divers moyens, intrusifs ou non dans le champ des libertés publiques, le recours aux interceptions de sécurité connaît certaines
limites. En effet, l’atteinte exceptionnelle à la vie privée qu’autorise la loi
ne peut être justifiée même dans ce domaine que par la menace directe
ou indirecte, actuelle ou future que la personne écoutée est susceptible
de représenter pour la sécurité nationale. En l’absence de menace, et
quel que soit l’intérêt que représente la cible comme source de renseignement pour le domaine considéré, l’atteinte à la vie privée serait
contraire aux principes de proportionnalité et de subsidiarité.
Enfin, la Commission opère une appréciation in concreto de la
notion « d’intérêts fondamentaux de la Nation », la notion de sécurité
étant appréhendée en un instant donné et dans un contexte géopolitique donné par rapport aux besoins vitaux du pays. Ainsi la Commission considère depuis plusieurs années que la sécurité énergétique fait
désormais intégralement partie de la sécurité nationale.

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