CNCIS – 20e rapport d’activité 2011/2012
9. Données techniques de communication. On regroupera sous
cette expression l’ensemble des informations produites à l’occasion de
l’émission d’une correspondance : nom de l’abonné de la ligne (fixe ou
mobile) depuis laquelle est émis le message, identité et localisation de
son interlocuteur, durée de la communication, entre autres exemples.
La question a pris un tour renouvelé avec l’affaire dite des « fadettes »
des journalistes du Monde, du nom des factures détaillées relatives aux
appels téléphoniques 1. Quoique les mises en examen prononcées le
fussent, notamment, pour violation du secret des correspondances, il
n’est guère concevable de retenir – dans la seule hypothèse d’une récupération de ces données, quelles qu’elles soient – une quelconque infraction à l’article 432-9, alinéa 2 du Code pénal pour la bonne et simple
raison qu’elles ne constituent absolument pas de la correspondance. La
raison en est simple : une correspondance est avant tout un message
acheminé d’un point à un autre par le réseau des communications électroniques. Or, ici, même si l’on sait que X a téléphoné à Y – qui se trouvait
à tel endroit –, tel jour, pendant x minutes, on reste en dépit de toutes ces
informations extrêmement précises, incapables de connaître le contenu
de leur conversation 2.
10. La Cour de cassation est d’ailleurs en ce sens puisqu’elle considère que l’identification des numéros de téléphone « entrants » et « sortants » d’une ligne déterminée n’est pas une interception de correspondance mais une simple mesure technique relevant de l’article 77-1 3 du
Code de procédure pénale 4. La jurisprudence administrative est, elle
aussi, à l’unisson puisque la cour administrative d’appel de Paris (CAA)
a jugé que le secret de la correspondance ne concerne pas la mention
d’une adresse électronique sur un site Internet destiné à la consultation
du public 5. Cette solution se répercute immanquablement sur l’appréhension que l’on doit avoir de l’acte d’interception lui-même.
11. L’interception de correspondance. Si n’est pas de la correspondance l’ensemble des données techniques de communications, alors les
opérations ayant vocation à les récupérer ne peuvent recevoir la qualification d’interception 6. Cette solution, relativement évidente, est à cet
égard confirmée par deux séries d’éléments. Tout d’abord, la jurisprudence est constante, qui conclut effectivement à l’absence d’interception
1) Mais cette affaire pose surtout la question du secret des sources des journalistes : Cass.
Crim. 6 déc. 2011 : Bull. crim. n° 248.
2) Sauf à l’avoir interceptée, ce qui constitue une hypothèse distincte.
3) Alors que les dispositions de l’article 60 du Code de procédure pénale, qui ont pour objet
de régir les réquisitions adressées par l’officier de police judiciaire à une personne qualifiée
pour qu’elle procède à des examens techniques ou scientifiques, sont étrangères aux
interceptions de communications téléphoniques : Cass. Crim. 23 mai 2006, Bull. crim. n° 141.
4) Cass. Crim. 27 juin 2001, n° 01-82578.
5) CAA de Paris, 24 janv. 2002 : D. 2003, somm., 1538.
6) Pas plus que d’enregistrement ou de transcription au sens des articles 100 et suivants
du Code pénal.
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