Jurisprudence de la Commission

Toutefois, pour recevoir la qualification de terroristes, ces actes doivent avoir été commis avec la volonté de troubler gravement l’ordre public
par l’intimidation ou la terreur, la gravité du trouble consistant dans la
peur collective que l’on cherche à répandre dans la population ou partie
de celle-ci en brisant sa résistance afin de promouvoir une cause ou faciliter le succès d’une revendication.
Force est donc de constater que n’importe quelle action d’expression ou de revendication politique, ou syndicale violente et susceptible
de troubler l’ordre public, ne saurait être qualifiée de terroriste.
L’article 3 de la loi du 10 juillet 1991 dispose que les interceptions
de sécurité peuvent être consenties pour la « prévention du terrorisme ».
Les interceptions vont donc se situer en amont du passage à l’acte afin
d’en empêcher la commission.
Tout l’enjeu est là : autoriser la surveillance ciblée des individus
les plus radicalisés afin de détecter à temps par exemple une dérive de
type « brigadiste » sans entrer pour autant dans une police de la pensée.
Caractériser une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste en accumulant les indices sur la logistique mise en place
(réseaux de financement fondés sur le don plus ou moins librement
consenti, l’exploitation de commerces ne respectant pas la législation
du travail, voire le crime organisé ; réseaux d’hébergement clandestin,
d’infiltration ou d’exfiltration ; caches d’armes) avant que celle-ci ne soit
activée pour planifier un ou plusieurs attentats qui, s’ils étaient commis,
seraient mis au passif d’autorités publiques imprévoyantes ou angéliques.
Autoriser la surveillance de terreaux ciblés sur lesquels la pensée terroriste peut éclore (dérive communautariste à caractère sectaire et vindicatif, endoctrinement de mineurs) sans porter atteinte à la liberté d’opinion
telle que protégée par les articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de
l’homme de 1789.
On le voit, la frontière est mince mais, s’agissant de certains mouvements tels que ceux énumérés par la dernière décision du Conseil de
l’Union européenne en la matière, à savoir celle du 29 mai 2006 (JOCE du
31 mai), l’exemple des attentats récents à travers le monde nous enseigne que le basculement peut être rapide et qu’il requiert par conséquent
une surveillance très en amont du passage à l’acte.
À ce propos on notera que la préparation en France d’actes à caractère terroriste devant être commis à l’étranger est susceptible comme telle
de recevoir une qualification pénale (cf. article 113-2 al. 2 du Code pénal
« […] l’infraction est réputée commise sur le territoire de la République
dès lors qu’un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire ») et entre
naturellement dans le champ de ce motif légal d’interception.

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