CNCIS – 21e rapport d’activité 2012-2013
justifie, n’a pas été remplie ; qu’il sera surabondamment fait observer
que, pour apprécier la proportionnalité des mesures envisagées au but
légitime poursuivi, le législateur a également précisé qu’il devait être
tenu compte, non seulement de la gravité du crime ou du délit, de l’importance de l’information recherchée pour la prévention ou répression
de cette infraction mais encore du fait que les mesures d’investigations
envisagées sont indispensables à la manifestation de la vérité ; qu’en
l’espèce, l’atteinte portée au droit fondamental à la protection des
sources des journalistes, pierre angulaire de la liberté de la presse dans
une société démocratique, apparaît en tout état de cause disproportionnée, dès lors qu’elle a été commise à partir de simples suppositions des
parties civiles sur une violation du secret de l’instruction échafaudées sur
la base des seuls éléments ci-dessus rapportés ; qu’elle ne répond pas à
l’exigence de proportionnalité posée tant par la Cour européenne des
droits de l’homme que par le législateur interne ; qu’en conséquence, les
réquisitions visant à des investigations sur les téléphones des journalistes précités, qui ont été prises sans leur accord, en violation manifeste
tant de l’article 10 de la CEDH que de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881,
doivent être annulées ; que l’annulation prononcée s’étendra à tous les
éléments dont elles sont le support nécessaire ;
« 1) alors que l’application immédiate de la loi nouvelle est sans
effet sur la validité des actes accomplis conformément à la loi ancienne ;
que l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881, et les dispositions selon lesquelles “à peine de nullité, ne peuvent être versés au dossier les éléments obtenus par une réquisition prise en violation de l’article 2 de la loi
du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse”, sont issues de la loi no 2010-1
du 4 janvier 2010 ; qu’en annulant les réquisitions adressées aux opérateurs de téléphonies, effectuées en exécution de commissions rogatoires
des 29 mars 2007, 23 janvier 2008 et 12 novembre 2009, et les retranscriptions subséquentes, aux motifs que ces réquisitions avaient été prises en
violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 issu de la loi du 4 janvier
2010, et sans l’accord des journalistes, la chambre de l’instruction a violé
l’article 112-4 du Code de procédure pénale ;
« 2) alors que s’agissant de réquisitions adressées non aux journalistes eux-mêmes, mais à des tiers non visés par les articles 56-1 à 56-3,
l’accord de ces journalistes n’était pas requis ; qu’en se fondant sur le
fait que les réquisitions adressées aux opérateurs de téléphonie avaient
été prises sans l’accord des journalistes pour les annuler, la chambre de
l’instruction a violé les articles 99-3, 60-1, alinéa 2, et 56-2 du Code de
procédure pénale ;
« 3) alors que la contradiction de motifs équivaut à une absence
de motifs, que l’arrêt ne peut, sans se contredire, retenir que les réquisitions avaient été délivrées à partir de simples conjectures ou suppositions d’une violation du secret de l’instruction de la part de la partie
civile tout en constatant qu’entre le début de la garde à vue le 22 janvier
2007 à 10 heures 05, et la fin de la garde à vue le 24 janvier à 10 heures,
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