Contributions

nature à concilier les exigences de l’intérêt public et la garantie des droits
et libertés des individus 1 ».
Là où le rapport Schmelck préconisait la désignation de quatre
parlementaires, d’un membre du Conseil d’État, de deux membres de
la Cour de cassation et de deux personnalités qualifiées, le texte voté
opta pour la nomination d’un haut fonctionnaire issu du Conseil d’État
ou de la Cour de cassation accompagné de deux parlementaires. Mais,
hormis ces détails techniques, la recherche de « personnalités indépendantes du pouvoir exécutif […] afin d’assurer à l’organe de contrôle une
autorité morale indiscutable 2 » est patente. D’une manière générale, le
modèle de la CNIL a constitué une indéniable source d’inspiration pour
la conception et la création de cette nouvelle instance 3.
L’avènement de la CNCIS constitua donc une nouveauté dans le
paysage du contrôle des décisions de l’État en matière d’interceptions
de sécurité puisque, auparavant, la décision du Premier ministre du
28 mars 1960 créant le Groupement interministériel de contrôle (GIC)
avait institué une commission composée d’un représentant des ministères de l’Intérieur ainsi que des Armées et présidée par un représentant
du chef du Gouvernement. Cette commission était chargée d’examiner la
conformité de la production du GIC avec les besoins des services et celle
des demandes formulées par ces derniers avec la réalité de leurs missions. En cas de difficulté, elle pouvait solliciter une réunion en comité
interministériel.
Toutefois, avec la CNCIS comme avec sa devancière, l’autorisation
de l’écoute procède uniquement du pouvoir exécutif, les seules fonctions d’avis et de contrôle ayant été « externalisées » au profit de l’AAI
créée en 1991. En outre, le Conseil d’État saisi pour avis n’a pas admis
qu’il soit octroyé à cette dernière le pouvoir d’ordonner au Premier
ministre d’interrompre une interception de sécurité considérée comme
illégale au motif que l’article 20 de la Constitution confie l’administration
au Gouvernement 4. Les prérogatives de l’instance ont donc clairement
été bornées, un partage des tâches établi qui concilie l’efficacité et les
impératifs démocratiques.
Néanmoins, en dépit de la limite ainsi instituée, la CNCIS a bénéficié dès son entrée en fonction de la bienveillance du Premier ministre
qui a accepté que le contrôle a posteriori prévu par la loi se mue en avis
de mise en œuvre ex ante. Cette pratique a été officiellement confirmée
par une directive du chef du gouvernement en date du 18 février 2008,

1) Reproduit in Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, Premier
rapport d’activité, 1991-1992, Paris, La Documentation française, 1993, p. 108.
2) Ibid.
3) Ibid., p. 131 ainsi qu’entretien avec Bruno Genevois, rapporteur de la commission
Schmelck.
4) Conseil d’État, Rapport public 1991, op. cit., p. 62.

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