CNCIS – 22e rapport d’activité 2013-2014

une large mesure de l’utilisation des techniques modernes d’enquête.
Toutefois, un tel objectif d’intérêt général, pour fondamental qu’il soit, ne
saurait à lui seul justifier qu’une mesure de conservation telle que celle
instaurée par la directive 2006/24 soit considérée comme nécessaire aux
fins de ladite lutte.
52. S’agissant du droit au respect de la vie privée, la protection de
ce droit fondamental exige, selon la jurisprudence constante de la Cour,
en tout état de cause, que les dérogations à la protection des données
à caractère personnel et les limitations de celle-ci doivent s’opérer dans
les limites du strict nécessaire (arrêt IPI, C-473/12, EU : C : 2013 : 715,
point 39 et jurisprudence citée).
53. À cet égard, il convient de rappeler que la protection des
données à caractère personnel, résultant de l’obligation explicite prévue
à l’article 8, paragraphe 1, de la Charte, revêt une importance particulière
pour le droit au respect de la vie privée consacré à l’article 7 de celle-ci.
54. Ainsi, la réglementation de l’Union en cause doit prévoir des
règles claires et précises régissant la portée et l’application de la mesure
en cause et imposant un minimum d’exigences de sorte que les personnes
dont les données ont été conservées disposent de garanties suffisantes
permettant de protéger efficacement leurs données à caractère personnel contre les risques d’abus ainsi que contre tout accès et toute utilisation illicites de ces données (voir, par analogie, en ce qui concerne
l’article 8 de la CEDH, arrêts Cour EDH, Liberty et autres c. Royaume-Uni,
no 58243/00, § 62 et 63, du 1er juillet 2008 ; Rotaru c. Roumanie, précité, §
57 à 59, ainsi que S et Marper c. Royaume-Uni, précité, § 99).
55. La nécessité de disposer de telles garanties est d’autant plus
importante lorsque, comme le prévoit la directive 2006/24, les données
à caractère personnel sont soumises à un traitement automatique et
qu’il existe un risque important d’accès illicite à ces données (voir, par
analogie, en ce qui concerne l’article 8 de la CEDH, arrêts Cour EDH,
S et Marper c. Royaume-Uni, précité, § 103, ainsi que M. K. c. France,
no 19522/09, § 35, du 18 avril 2013).
56. Quant à la question de savoir si l’ingérence que comporte la
directive 2006/24 est limitée au strict nécessaire, il convient de relever que
cette directive impose, conformément à son article 3 lu en combinaison
avec son article 5, paragraphe 1, la conservation de toutes les données
relatives au trafic concernant la téléphonie fixe, la téléphonie mobile,
l’accès à l’internet, le courrier électronique par Internet ainsi que la téléphonie par l’internet. Ainsi, elle vise tous les moyens de communication
électronique dont l’utilisation est très répandue et d’une importance
croissante dans la vie quotidienne de chacun. En outre, conformément
à son article 3, ladite directive couvre tous les abonnés et utilisateurs
inscrits. Elle comporte donc une ingérence dans les droits fondamentaux
de la quasi-totalité de la population européenne.

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