CNCIS – 22e rapport d’activité 2013-2014

30. Si les renvois préjudiciels dans les présentes affaires soulèvent
notamment la question de principe de savoir si les données des abonnés
et des utilisateurs inscrits peuvent ou non, au regard de l’article 7 de
la Charte, être conservées, ils concernent également celle de savoir si
la directive 2006/24 répond aux exigences de protection des données à
caractère personnel découlant de l’article 8 de la Charte.
31. Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient, aux fins
de répondre à la deuxième question, sous b) à d), dans l’affaire C-293/12
et à la première question dans l’affaire C-594/12, d’examiner la validité
de la directive au regard des articles 7 et 8 de la Charte.
Sur l’existence d’une ingérence dans les droits consacrés par les
articles 7 et 8 de la Charte
32. En imposant la conservation des données énumérées à l’article
5, paragraphe 1, de la directive 2006/24 et en permettant l’accès des
autorités nationales compétentes à celles-ci, cette directive déroge, ainsi
que l’a relevé M. l’avocat général notamment aux points 39 et 40 de ses
conclusions, au régime de protection du droit au respect de la vie privée,
instauré par les directives 95/46 et 2002/58, à l’égard du traitement des
données à caractère personnel dans le secteur des communications
électroniques, ces dernières directives ayant prévu la confidentialité des
communications et des données relatives au trafic ainsi que l’obligation
d’effacer ou de rendre anonymes ces données lorsqu’elles ne sont plus
nécessaires à la transmission d’une communication, hormis si elles
sont nécessaires à la facturation et uniquement tant que cette nécessité
perdure.
33. Pour établir l’existence d’une ingérence dans le droit fondamental au respect de la vie privée, il importe peu que les informations relatives
à la vie privée concernées présentent ou non un caractère sensible ou
que les intéressés aient ou non subi d’éventuels inconvénients en raison
de cette ingérence (voir, en ce sens, arrêt Österreichischer Rundfunk e. a.,
C-465/00, C-138/01 et C-139/01, EU : C : 2003 : 294, point 75).
34. Il en résulte que l’obligation imposée par les articles 3 et 6 de la
directive 2006/24 aux fournisseurs de services de communications électroniques accessibles au public ou de réseaux publics de communication
de conserver pendant une certaine durée des données relatives à la vie
privée d’une personne et à ses communications, telles que celles visées
à l’article 5 de cette directive, constitue en soi une ingérence dans les
droits garantis par l’article 7 de la Charte.
35 En outre, l’accès des autorités nationales compétentes aux
données constitue une ingérence supplémentaire dans ce droit fondamental (voir, en ce qui concerne l’article 8 de la CEDH, arrêts Cour EDH,
Leander c. Suède, 26 mars 1987, série A no116, § 48 ; Rotaru c. Roumanie
[GC], no 28341/95, § 46, CEDH 2000-V, ainsi que Weber et Saravia
c. Allemagne (déc.), no 54934/00, § 79, CEDH 2006-XI). Ainsi, les articles

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