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La tutelle du ministère de la Défense sur trois des six services de
renseignement présente un intérêt particulier en ce qu’elle constitue un puissant
facteur de cohérence, d’abord en matière de moyens alloués et de ressources
humaines employées. Si la DGSE a pris, en ce domaine, une avance considérable,
elle montre également en partie la voie à suivre pour effectuer un indéniable saut
qualitatif. Car le défi auquel est aujourd’hui confronté le ministère de la Défense
est de rendre moins rigide sa gestion des ressources humaines afin de valoriser les
compétences au cours d’un parcours professionnel, de favoriser l’émergence d’un
vivier d’agents du renseignement susceptibles d’effectuer des mobilités dans les
trois services étudiés, voire au sein de la communauté française dans son
ensemble.
La mobilité pourrait également constituer une condition d’accès à certains
postes, comme c’est déjà le cas à la DGSE. Appliquée à une échelle supérieure,
cette pratique permettrait de professionnaliser le corps d’encadrement des services
de renseignement, voire de fournir leurs futurs dirigeants. Bien évidemment, il
revient à l’Académie du renseignement de jouer un rôle majeur dans ce processus.
Enfin, le monopole des moyens techniques exercé par la DGSE n’empêche
nullement d’envisager une rationalisation des outils consacrés à l’imagerie
géospatiale afin de gagner en efficacité mais également de réaliser des économies
d’échelles.
Alors que la distinction entre « temps de paix » et « temps de guerre » tend
à s’estomper et dans un contexte de raréfaction de la ressource publique, notre
pays a plus que jamais besoin de professionnaliser son appareil de renseignement
à coût constant. Le ministère de la Défense semble constituer un terrain
d’expérimentation idéal pour relever pareil défi.
IV. DIFFUSER LA CULTURE DU RENSEIGNEMENT AU PROFIT DES
SERVICES ET DE LA NATION
Notre pays est confronté à de nombreux paradoxes : grande nation de renseignement, ses services spécialisés n’ont pourtant pas réussi à constituer un échelon adéquat du processus décisionnel tandis que les Français méconnaissent leurs
activités et leur utilité. Dès lors, la diffusion de la culture du renseignement (y
compris dans sa dimension économique) représente un enjeu décisif qu’il convient
de prendre en considération. Toutefois, il s’agit sans doute de la réforme la plus
complexe à mettre en œuvre dans la mesure où elle touche aux fondements mêmes
de notre système de convictions, de nos mentalités.