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ministre Michel Rocard, le directeur général Claude Silberzahn entreprend de
réduire au sein du service la proportion des militaires par rapport aux personnels
civils.
Le but est de faire évoluer la culture dominante essentiellement orientée
vers l’action clandestine, « construite à partir d’un état d’esprit spécifique (un
métier de seigneurs) dans un contexte hors norme (illégalité légitimée par la
raison d’État) » (1). Cette mutation prendra une vingtaine d’années au cours
desquelles le service connaîtra des changements progressifs mais inexorables. Si
bien qu’en 2012, les effectifs civils représentent 72 % du total des personnels.
D’autre part, rares sont les ministres de la défense à avoir exercé une réelle
autorité sur le service extérieur qui entretient une relation privilégiée avec la
présidence de la République. De telle sorte qu’un ancien Premier ministre a pu
indiquer que la DGSE se trouvait « en pension » au ministère de la défense. De
fait, son positionnement au sein de celui-ci lui permet de bénéficier des outils de
gestion administrative et financière ainsi que de la latitude qu’offre un budget de
l’ampleur de celui de la défense.
Contrairement aux deux autres services déjà évoqués, le mode d’action de
la DGSE est essentiellement clandestin et les missions qu’elle assume s’avèrent de
plus en plus interministérielles, généralistes, ne se limitant guère aux enjeux
militaires. Selon la définition qu’en donne le code de la défense, la Direction
générale de la sécurité extérieure a pour vocation de rechercher et d’exploiter les
renseignements intéressant la sécurité de la France à l’étranger, d’identifier et de
neutraliser toute menace. De fait, les champs d’action du service recouvrent à la
fois le contre-terrorisme, la contre-prolifération, le contre-espionnage, la sécurité
économique et la criminalité organisée.
La DGSE assume donc une double mission de renseignement et
d’intervention, fondée sur le monopole de l’action clandestine à l’étranger. Elle
assure l’analyse, la synthèse et la diffusion des informations qu’elle recueille, par
ses moyens propres ou auprès de partenaires étrangers. Dans ce but, elle est
notamment chargée d’assurer les liaisons nécessaires avec les autres services ou
organismes concernés. En outre, elle entreprend, dans le cadre de ses attributions,
toute action qui lui serait confiée par le Gouvernement (2). La DGSE dispose à cet
effet de son propre « service action » (SA), lui permettant de mener des
opérations. Celle qu’il a menée le 12 janvier 2013 en Somalie où, pour la première
fois depuis 1959, la direction a perdu trois agents dans la même mission, constitue
une illustration de cette compétence particulière.
À cet égard, la mission s’est interrogée sur l’utilité de préserver cette
fonction compte tenu de l’existence, au sein des armées, du commandement
des forces spéciales (COS) destiné à accomplir des opérations similaires.
Cependant, même s’il s’investit lui aussi dans le domaine du renseignement, le
(1) Franck Bulinge, De l’espionnage au renseignement, Vuibert, 2012, p.124.
(2) Article D. 3126-1 du code de la défense.

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