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De surcroît, les activités de police judiciaire étant soumises au contrôle des
magistrats, leur caractère confidentiel n’est pas garanti. À ce titre, l’audition des
policiers ayant effectué des surveillances dans l’affaire de Tarnac (1) démontre les
risques induits par la double qualité police administrative/police judiciaire. Il
serait dès lors opportun que la DGSI privilégie ses activités de police
administrative sur celles de police judiciaire.
Cependant, l’évolution entamée demeurerait inaboutie si elle ne
s’accompagnait d’un accroissement des effectifs de la nouvelle sous-direction
judiciaire soumise à une lourde charge de travail. En effet, celle-ci donne
l’impression à certains magistrats spécialisés, à l’instar du juge Marc Trévidic, que
« les effectifs policiers affectés au département judiciaire de la DCRI ont
fondu (2) ». Pourtant, les *** fonctionnaires qui composaient le département
judiciaire au 1er juillet 2008 ont été rejoints par *** personnels supplémentaires.
d) Un traitement restrictif de la lutte contre la subversion violente
À l’occasion de la réforme entreprise après l’affaire Merah, la
sous-direction du contre-terrorisme a fusionné avec celle de la lutte contre les
subversions violentes. Ce faisant, les dirigeants de la DCRI considèrent que les
deux missions ainsi confondues ont une finalité commune : la lutte contre les
extrémismes violents. En outre, ils affirment qu’en raison des méthodes très
intrusives mises en œuvre, la surveillance ne s’exerce pas sur des mouvances mais
sur des profils prêts à basculer dans la violence. Aussi, la subversion violente
est-elle uniquement envisagée comme un comportement infra-terroriste. Pourtant,
l’article 1er du décret fondateur de la DCRI précise que le service « participe
également à la surveillance des individus, groupes, organisations et à l’analyse
des phénomènes de société, susceptibles, par leur caractère radical, leur
inspiration ou leurs modes d’action, de porter atteinte à la sécurité nationale. »
À l’évidence, la DCRI a considérablement restreint le champ de la
subversion violente pour n’en conserver que le caractère terroriste (affirmant
plus encore sa dimension de service antiterroriste) et individuel. Le service
considère que le suivi des mouvements politiques radicaux échoit à la SDIG qui
n’en a pourtant pas les moyens (ni techniques, ni humains). Cette conception ne va
pas sans poser problème, comme l’illustre l’épisode de l’occupation du chantier de
la mosquée de Poitiers, le samedi 20 octobre 2012, par 73 militants du groupe
Génération identitaire.
Indéniablement, sa mise en cause dans l’affaire de Tarnac a refroidi les
ardeurs de la DCRI lorsqu’il s’agit de s’engager dans la surveillance de ces
mouvances politisées prêtes à basculer dans la violence. Dans la même optique, le
dossier Notre-Dame-des-Landes illustre parfaitement la difficulté qu’éprouve le
(1) Les avocats des accusés avaient sollicité l’audition des policiers ayant effectué des surveillances. Si les
juges de Nanterre s’y sont opposés, la cour d’appel de Versailles a pour sa part accédé à la requête et a
également fait droit à la demande de communication des numéros de téléphone des agents concernés (elle a
néanmoins refusé d’ordonner la saisie de leurs ordinateurs).
(2) AEF Sécurité globale, dépêche n°5814, 6 avril 2012.

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