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crise dure généralement plus longtemps que le décret ; de telle sorte que les
services doivent intégrer dans leur immuable dotation en fonds spéciaux de
nouvelles dépenses qui supposent d’autres économies parfois préjudiciables.
En conséquence, la Commission réaffirme son désir de voir la dotation en
fonds spéciaux accrue de manière conséquente afin d’intégrer le montant
cumulé des DDAI et d’offrir aux services concernés une gestion plus saine et
sereine de leurs budgets sur le moyen terme. Pareille décision permettra de
limiter le recours aux DDAI et de le restreindre à son objet principal : la
gestion temporaire de l’imprévisible [recommandation n°18]. Cependant,
l’accroissement souhaité de l’enveloppe ne saurait se limiter à la seule prise
en compte des DDAI mais doit au contraire aller au-delà.
D. REVOIR LES
SPÉCIAUX
MÉCANISMES
D’ATTRIBUTION
DES
FONDS
De jure, le Premier ministre rend les arbitrages budgétaires qui
président à la répartition des fonds spéciaux entre les services de
renseignement. Toutefois, le Coordonnateur national du renseignement,
collaborateur du Président de la République, joue naturellement le rôle de
centralisateur des demandes formulées par les services. Par ce biais, il réalise
en réalité le premier arbitrage budgétaire qui s’avérera déterminant, le
cabinet du Premier ministre s’écartant rarement des préconisations de celui
qui paraît le mieux placé pour évaluer les besoins financiers des
administrations concernées.
Aussi l’idée de rattacher le Coordonnateur national du
renseignement tant à l’Élysée qu’à Matignon se révèle-t-elle séduisante (en le
nommant par exemple conseiller renseignement du Premier ministre à
l’image de pratiques qui ont déjà eu cours). Des rapports parlementaires ont
précédemment formulé des recommandations en ce sens (1). Il s’agirait non
de le détacher du chef de l’État mais plutôt de le rapprocher du chef du
Gouvernement. Le Coordonnateur serait concomitamment le collaborateur
des deux têtes de l’exécutif.
En effet, comment continuer à ignorer son rattachement pour le
moins baroque ? Ainsi, selon le décret n° 2010-299 du 22 mars 2010, le
Coordonnateur et son équipe relèvent-ils « pour [leur] gestion administrative et
financière » du Secrétariat général du gouvernement, donc du Premier
ministre, alors même que le Président de la République est le principal
bénéficiaire de leur action. Une telle évolution permettrait de lui confier
d’utiles capacités d’arbitrages budgétaires, ainsi que l’évoque le Livre blanc
de 2013 (2). Si les arguments avancés n’ont jusqu’à présent pas porté, la CVFS
(1) Sur ce point, se référer au rapport de Jean-Jacques Urvoas et Patrice Verchère, op. cit., p. 108 et s.
ainsi qu’au rapport public de la Délégation parlementaire au renseignement pour l’année 2014, p. 22-23.
(2) Livre blanc : Défense et sécurité nationale, Paris, La Documentation Française, 2013, p. 71