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nouvelle Commission de vérification des fonds spéciaux (1) instituée à
l’article 154 de la loi de finances pour 2002 : il se contenta en effet de
reproduire la quasi-totalité du décret de 1947 en intégrant des
parlementaires dans le collège. Pourtant, le passage d’un contrôle à vocation
interne à un contrôle externe aurait pu induire des innovations.
Lors de la discussion parlementaire, en dehors des controverses
politiques autour des récents scandales liés à l’utilisation des fonds spéciaux,
les débats ont porté sur la présidence de la future commission (confiée soit à
la Cour des comptes soit à un député), sur la nécessité de doter l’instance
d’un secrétariat chargé de l’assister (2), sur celle de définir une nomenclature
des pièces justificatives, sur celle de produire un rapport, mais également sur
la nature parlementaire du contrôle effectué. En effet, les Sénateurs rejetaient
le principe d’une habilitation ès qualités des parlementaires membres de
l’instance et marquaient une réserve quant à la possibilité pour ces derniers
de s’intéresser aux opérations en cours ainsi que de réaliser des enquêtes sur
pièces et sur place. Le Palais du Luxembourg s’opposait donc aux attributs
du contrôle parlementaire. Le dernier mot revenant à l’Assemblée nationale,
la version maximaliste a recueilli la faveur des députés.
En cohérence avec les débats conduits, les sénateurs de l’opposition
saisirent le Conseil constitutionnel au motif que le dispositif prévu
« encour[ai]t, sinon la censure, du moins de strictes réserves d’interprétation en ce
qu’il enfrei[gnait]t le principe de la séparation des pouvoirs et, en particulier,
l’exclusivité des responsabilités du Président de la République et du Premier
ministre en matière de défense nationale ». Dans leur saisine, ils observaient que
la désignation au sein de la commission n’était pas subordonnée à une
habilitation de niveau Très Secret-Défense (laquelle suppose l’accord du
Premier ministre). Ils soulignaient ensuite que la commission était appelée à
obtenir communication de l’état des dépenses se rattachant à des opérations
en cours, prérogative selon eux susceptible de compromettre la sécurité de
celles-ci. Enfin, ils insistaient sur le fait que la nouvelle instance ne saurait
confier à l’un de ses membres des pouvoirs d’enquêtes et d’investigations en
vue de contrôler sur pièce et sur place les faits retracés dans les documents
comptables soumis à sa vérification. Ils concluaient donc que « [t]outes ces
prérogatives sont excessives et mettent en péril la sécurité des opérations des
services secrets, ainsi que, par conséquent, la séparation des pouvoirs elle-même (3). »
Le Gouvernement, dans ses observations sur les recours formulés
contre la loi de finances (4), rétorqua sur deux principaux points que « la
(1) Comme le remarque Xavier Cabannes, « La réforme des fonds spéciaux », Droit et défense, janvier
2002, p. 39.
(2) Sur ce point, un amendement du sénateur François Marc n’a hélas pas prospéré à l’Assemblée
nationale.
(3) Saisine du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 2001 présentée par plus de soixante
sénateurs, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 2001-456
DC.
(4) Journal officiel du 29 décembre 2001.

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