La CNIL n'ignore pas que, parmi ses missions, la gendarmerie
a une mission importante de police judiciaire qui justifie qu'elle
utilise des indications sur les condamnations. Toutefois, il convient
de tenir compte de la loi n° 80-02 du 4 janvier 1980 relative à l'automatisation du casier judiciaire (JO, 5 janvier 1980). Celle-ci met en
place un nouveau système qui vise à éviter la prolifération des
fichiers : toutes précautions sont prises pour assurer la fiabilité et
la sécurité de ce système. Le cas de la gendarmerie est expressément prévu par le législateur qui, dans un nouvel article 773-1 du
Code de procédure pénale, décide que :
« Une copie de chaque fiche constatant une condamnation à
une peine privative de liberté prononcée pour crime ou délit est
adressée au sommier de police technique tenu par le ministre de
l'Intérieur. La consultation de ce fichier est exclusivement réservée
aux autorités judiciaires et aux services de police et de gendarmerie (...) » Cette disposition semble mettre fin implicitement à la
pratique des relevés de condamnations par les brigades de gendarmerie.
La poursuite du système des relevés définie dans une instruction de 1971 ne paraît pas conciliable avec un contexte législatif qui
a évolué. Ainsi les fichiers des brigades de gendarmerie contiennent
plus de données que le sommier de police technique ou le casier
judiciaire officiel puisqu'en particulier y sont conservées les traces
des condamnations qui ne comportent pas de peines privatives de
liberté et qu'il n'est pas tenu compte des lois d'amnistie. Les
données sont peu fiables ; le registre d'appel ne semble pas être
consulté régulièrement pour mettre à jour les informations. Enfin,
le droit d'accès n'est pas organisé.
Or, la loi du 6 janvier 1978 insiste sur plusieurs notions. D'abord
celle de finalité : peut-on utiliser à des fins de police administrative un relevé de condamnations, ce qui était de pratique courante.
En outre, les droits à l'exactitude et à l'oubli impliquent qu'un fichier
soit mis à jour et que certaines informations soient effacées. Le
droit d'accès est enfin un droit essentiel qui a été organisé pour
le casier judiciaire national automatisé.
Aussi la CNIL a-t-elle estimé que la gendarmerie devait harmoniser ses pratiques avec les nouvelles législations.
Pour sa part, le Conseil d'Etat a considéré que « dans l'exercice
de sa mission générale de police judiciaire, la gendarmerie soumise
à la direction et au contrôle de l'autorité judiciaire doit être regardée
comme dépendant du ministère de la Justice au sens de l'article 777-3 du Code de procédure pénale ». Cette disposition ajoutée
par la loi du 4 janvier 1980 indique dans son second alinéa
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