- 219 -
données orbitographiques plus ou moins précises. Bien que la France fasse
partie des très rares pays au monde capables d’apporter un regard critique
sur ces informations grâce aux moyens de surveillance dont nous disposons,
nous n’en sommes pas moins dépendants de ce que nos partenaires
américains veulent bien nous dire. Les analyses conduites par les armées et
le CNES ont déjà permis de mettre en évidence l’absence dans ce catalogue
de certaines plateformes américaines et, dans d’autre cas, des trajectoires
sensiblement différentes de celles qui y étaient décrites 1.
Les États-Unis fournissent par ailleurs gratuitement à tous les
opérateurs de satellites des alertes en cas de risques de collision. L’essentiel
des procédures françaises d’anticollision sont fondées sur ces données
américaines. Il s’agit d’une réelle dépendance, dont la portée doit toutefois
être nuancée compte tenu de la communauté d’intérêts dans laquelle se
trouvent tous les opérateurs de satellites. Chacun d’entre eux souhaite en
effet se soustraire autant que possible au risque de collision de ses
plateformes orbitales, à commencer par les États-Unis qui sont de loin les
plus exposés.
Disposer de nos propres capacités de moyens de surveillance et
d’analyse est essentiel dans l’exercice de notre souveraineté. Il ne s’agit pas
seulement de pouvoir acheter des images à nos partenaires, encore faut-il
être en mesure de garantir leur intégrité, ce qui suppose une forme de
traçabilité en amont.
Recommandation n° 47 : Mettre fin à notre dépendance à l’égard
des États-Unis en nous dotant de capacités propres – a minima
européennes sinon nationales – d’observation et d’analyse de la situation
de l’eEspace et lancer un programme français de développement d’un
nouveau système plus performant de surveillance de l’espace pour
succéder au démonstrateur GRAVES.
On a en effet pu constater par le passé combien la « guerre des
images » pouvait emporter des décisions historiques. Ainsi en a-t-il été de la
réunion du conseil de sécurité d’octobre 1962 au cours de laquelle les
Américains avaient apporté la preuve en images que les Soviétiques
installaient des missiles à Cuba. Plus récemment, en 2003, on se souvient que
le secrétaire d’État américain Colin Powell avait accusé l’Irak de cacher des
armes prohibées et de tromper les inspecteurs de l’Onu, lors d’un
réquisitoire très sévère devant le Conseil de sécurité, étayé par des bandes
sonores et de nombreuses photos satellite. Or les services de renseignement
français, disposant de leurs propres images, avaient pu éclairer les plus
hautes autorités de l’État sur la véracité des affirmations américaines ; ce qui
ne fut pas sans conséquences sur la politique étrangère et de défense de
notre pays.
1
*****