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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

détermination de ces dernières reste le plus souvent inchangée, comme l’a
souligné une personne entendue par votre commission d’enquête 1, « leurs
déclarations oscillant toujours entre dissimulation et désir de repartir au combat ».
Ces entretiens présentent également l’inconvénient pour les services de se
dévoiler et de faire connaître à la personne convoquée qu’elle est suivie ou
surveillée.
S’agissant des entretiens avec les familles, dont les résultats sont
plus probants, il apparaît, pour reprendre les termes d’une personne
entendue par votre commission d’enquête, que les parents « tombent souvent
de l’armoire » quand ils sont informés de la radicalisation de leur enfant et les
mesures qu’ils sont amenés à prendre en réaction sont souvent inefficaces
pour empêcher le départ. Dans nombre de cas les services sont amenés à
mettre en garde la famille sur l’impossibilité, dans le cas d’une issue
tragique, de récupérer le corps en raison du rite musulman qui impose un
enterrement dans les meilleurs délais. Pour les parents d’enfants n’ayant pas
encore atteint la majorité, la DGSI fait appel à leur responsabilité parentale et
les informe de l’existence du nouveau dispositif d’OST, dont la mise en
œuvre suppose leur coopération active.
En outre, la charge de travail des services a considérablement cru
avec la mise en place des dispositifs de signalement, qu’il s’agisse du
CNAPR ou des cellules de veille préfectorales. Lors des entretiens à
Strasbourg, l’attention de votre commission d’enquête a été attirée sur le fait
qu’outre le suivi des manifestations, des voyages officiels et des enquêtes, le
renseignement territorial était désormais pleinement mobilisé sur cette
thématique, mettant en lumière son manque de moyens humains de
manière générale et plus particulièrement pour effectuer des tâches
opérationnelles. Il a notamment été souligné que l’enregistrement et le suivi
des signalements constituaient des tâches occupant deux fonctionnaires à
temps plein, lesquels fonctionnaires étant les spécialistes de l’Islam. Ce
constat, qui concerne aussi d’autres forces de sécurité, conduit votre
rapporteur à considérer que le manque d’effectifs sur le terrain amène
nécessairement les services à délaisser, par nécessité, le suivi d’autres
situations.
L’explosion de la charge de travail concerne également les dossiers
judiciarisés. Comme cela a été indiqué lors des auditions : « Les services
enquêteurs sont débordés, et n’ont plus le temps, après l’interpellation des
individus, de traiter les commissions rogatoires. En d’autres termes, nous
n’assurons pas le service après-vente », le risque étant que fautes d’éléments
discriminants « tous, adolescents paumés et terroristes chevronnés, se voient
infliger la même peine par le tribunal ». La multiplication des procédures
judiciaires conduit les services enquêteurs à traiter le flux, au détriment du
stock. Ainsi, d’après un interlocuteur de votre commission d’enquête « un
« La détermination des jeunes partis en Syrie ou en Irak est totale, et l’interro gatoire des
services ne leur fait aucun effet ».
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