- 89 -

a) Les services débordés par le nombre signalements et de cibles à suivre
Lors de sa visite du CNAPR en décembre dernier, il était indiqué à la
délégation de votre commission d’enquête que le dispositif national et
territorial de suivi avait conduit au signalement de 1 498 personnes
radicalisées. Trois mois plus tard, ce nombre s’élevait à 3 246, soit une
augmentation de 116 %. Cette hausse illustre à elle seule l’ampleur du
phénomène et la rapidité de son évolution. Elle constitue un défi non
négligeable pour les services chargés de la lutte antiterroriste puisqu’à
effectifs inchangés, ce sont plusieurs centaines de nouvelles personnes qui
doivent être prises en charge ou, en fonction de leur dangerosité,
surveillées alors même que les évènements de janvier 2015 ont montré
l’impérieuse nécessité de ne pas négliger la surveillance des « cibles » plus
anciennes. Selon le Ministère de l’intérieur, les individus nécessitant une
attention particulière de la DGSI approchent les 3 000, dont
1 432 impliqués directement dans les filières syriennes 1, alors que ce
nombre s’élevait à 1 100 au mois de novembre 2014 2. À la date du
19 mars 2015, pratiquement tous les départements français étaient, dans des
proportions variables, concernés par des cas d’individus radicalisés.
Dans ces conditions, il a été indiqué à votre commission d’enquête
que la DGSI a, depuis le début de l’année 2014, systématisé les entretiens
administratifs avec les personnes impliquées dans les filières
syro-irakiennes. Bien que non contraintes, sur le plan juridique, de déférer à
la convocation, les personnes se présentent dans la plupart des cas. Cette
pratique permet aux services d’échanger avec les personnes suspectées de
vouloir rejoindre une organisation terroriste à l’étranger ou d’en revenir. Au
cours des entretiens, qui permettent de valider certaines informations, la
DGSI procède à des mises en garde portant sur les risques auxquels
s’exposent les candidats au djihad. À la date du 15 janvier 2015, la DGSI
avait procédé à 144 entretiens avec des candidats dont les velléités de
rejoindre la Syrie avaient été confirmées par des investigations. Un total de
31 entretiens avait été réalisé avec des individus revenus des théâtres
d’opération pour lesquels elle ne disposait pas de preuves de participation
aux combats permettant une judiciarisation du cas, le but humanitaire du
déplacement étant souvent mis en avant. Par ailleurs, la DGSI avait réalisé
290 entretiens administratifs avec des membres de l’entourage des candidats
au djihad (parents, proches, amis) désireux de signaler un membre de leur
entourage sur le départ ou déjà parvenu sur zone.
Les services font valoir le caractère particulièrement chronophage de
cette nouvelle pratique, 465 entretiens administratifs ayant été menés en un
an, et ses effets contrastés. Si ces entretiens permettent à la DGSI de mieux
cerner le profil type des personnes impliquées dans les filières terroristes, la
Une personne entendue par votre commission d’enquête ayant déclaré : « Voilà les chiffres
certains : mais n’oublions pas le chiffre noir, celui que nous ignorons totalement … ».
2 Ce nombre de 1 100 étant lui-même deux fois plus élevé qu’au début de l’année 2014.
1

Select target paragraph3