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des menaces à l’égard des forces de l’ordre ou de certains musulmans (…). Il n’y a
pas de frontière entre cette propagande terroriste et l’antisémitisme ».
Or l’existence de propos pouvant être appréhendés aux frontières de
deux procédures, celle issue de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse
et celle issue du code de procédure pénale, exposent les parquets à des
écueils procéduraux importants susceptibles de conduire à l’irrégularité des
procédures engagés et donc à l’extinction de l’action publique. Ainsi la
difficulté de l’action publique à poursuivre des comportements qui heurtent
pourtant les intérêts fondamentaux de la société alimente l’argumentation en
faveur d’une pénalisation des infractions de presse.
Il convient néanmoins de rappeler la raison qui a conduit à
l’instauration de règles procédurales dérogatoires pour ce type de délits. Les
règles procédurales de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse ont
pour objectif premier de protéger la liberté d’expression. En conséquence,
elles encadrent autant que possible toutes les actions qui auraient pour
effet de restreindre cette liberté constitutionnelle. Ainsi, l’action publique
se prescrit par trois mois (à l’exception des provocations à la discrimination,
à la haine ou à la violence à caractère raciste ou religieuse, des contestation s
de crime contre l’humanité et les diffamations et injures à caractère racial
dont la prescription est d’un an) et sa mise en mouvement dépend d’une
plainte préalable de la victime dans de nombreuses hypothèses.
Parallèlement, le désistement du plaignant met fin à la poursuite.
D’importantes exigences de précision pèsent sur le ministère public : la
poursuite est définitivement fixée par la citation introductive d’instance
quant aux faits (ce qui implique une énumération exhaustive de tous les
propos) et à la qualification choisie : ni le ministère public ni le magistrat
instructeur ne peut requalifier la qualification choisie. La loi du 29 juillet
1881 encadre également très strictement les actes pouvant être considérés
comme interruptifs de prescription. Enfin, des droits particuliers sont
reconnus à la défense à l’instar des moyens de la bonne foi, de l’exception de
vérité1 ou encore l’exception de provocation 2.
On doit toutefois constater que ces procédures spécifiques posent
des problèmes particuliers pour les messages diffusés uniquement sur
Internet, notamment pour établir le point de départ de la prescription d’un
délit instantané. En raison de la censure par le Conseil constitutionnel de
dispositions spécifiques au sein de la LCEN, les règles traditionnelles de
prescription s’appliquent aux informations diffusées sur Internet, sous
réserve d’évolution jurisprudentielle de la Cour de cassation. Ainsi, des pans
du traitement des infractions de presse commises sur Internet sont encore
Selon la jurisprudence de la Cour de cassation (Crim, 28 mars 2006, Bull. crim n° 90), aucune
exception de vérité ne peut être soulevée en matière de diffamation raciale ou à caractère homophobe.
Néanmoins, cette interdiction de la preuve de la vérité n’est pas prévue par l’article 35 de la loi du
29 juillet 1881.
2 Ainsi, selon l’article 33 de la loi de 1881, la provocation ne pourra être retenue lorsque la victime
des injures se sera préalablement rendue coupable de provocation.
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