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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

un conjoint combattant. Toutefois, si elles participent rarement aux conflits
armés, la plus grande partie des femmes ont fait allégeance à un groupe
terroriste identifi��, ce qui permet leur incrimination pour association de
malfaiteurs en lieu avec une entreprise terroriste1. Il serait préférable de ne
pas faire perdurer ce signal d’impunité à l’égard des adolescentes et des
jeunes femmes, qui alimente les filières djihadistes.
(2) Adapter la réponse judiciaire aux mineurs

La majorité des mineurs impliqués dans les filières djihadistes en
Syrie ont subi le choix de leurs parents. Seuls 66 d’entre eux, dont 38 jeunes
filles, ont délibérément rejoint la zone irako-syrienne. Au 1 er janvier 2015,
9 mineurs étaient mis en examen dans le cadre d’une information judiciaire
liée aux filières djihadistes syriennes.
Il a été rapporté à votre commission l’incompréhension de parents
quant à la mise en examen de leur enfant, qu’il soit mineur ou jeune majeur,
qu’ils considèrent avant tout comme victime d’un « enrôlement ». À cet égard,
votre rapporteur rappelle que l’opportunité de la réponse judiciaire, appréciée
par les magistrats, facilite, plus qu’elle n’empêche, la mise en place de mesures
éducatives. La spécificité de la justice des mineurs tient à ce qu’elle ne sépare pas
l’enfance délinquante de l’enfance en danger et à ce qu’elle privilégie une prise en
charge globale de l’enfant. Cette primauté à l’éducation est inscrite dans
l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante dont
l’exposé des motifs rappelle que « la France n’est pas assez riche d’enfants pour
qu’elle ait le droit de négliger tout ce qui peut en faire des êtres sains ».
Le pôle antiterroriste de Paris a pour politique de ne pas judiciariser
les affaires impliquant des départs ou des velléités de départs d’adolescents
immatures, en rupture scolaire ou familiale, victimes d’endoctrinement sur
Internet et dont les comportements s’inscrivent dans un processus de quête
identitaire. La réponse judiciaire semble devoir être réservée aux personnes
ayant joué un rôle actif et violent dans la zone syro-irakienne, au sein de
filières de recrutement ou en cas de menace d’une action violente sur le
territoire national. C’est par exemple cette hypothèse qui a prévalu pour la
mise en examen de huit mineurs pour association de malfaiteurs en lien avec
une entreprise terroriste, placés sous contrôle judiciaire, et la mise en examen
d’un mineur pour meurtres en relation avec une entreprise terroriste et placé
en détention provisoire.
L’instruction préparatoire des affaires de terrorisme impliquant des
mineurs est menée par les juges spécialisés du pôle antiterroriste de Paris.
Après ordonnance de renvoi devant le tribunal pour enfants de Paris,
l’affaire est examinée au fond par les juges pour enfants traitant de manière
habituelle des affaires de droit commun. L’accusation est en revanche portée
par un représentant de la section antiterroriste du parquet de Paris. Ainsi, il
1

Cf. page 66.

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