Études et documents
dispositifs d’écoute généraliste de l’ensemble du pays. La réflexion concernant les données que la justice peut légitimement demander aux opérateurs
de conserver ne saurait être engagée sans consultation préalable de ceux
que ces nouvelles mesures législatives vont concerner. Le législateur ne
saurait faire l’impasse sur l’avis en la matière des opérateurs internet, mais
pas plus sur celui des représentants de la société civile informatique, et plus
largement de tous les utilisateurs des réseaux électroniques et de communication. Le droit imprescriptible à l’anonymat et à la vie privée ne saurait être
diminué par de nouvelles lois d’exception prenant prétexte de nouveaux
médias. Il existe déjà en France des dispositifs réglementaires sur la protection de la correspondance postale, sur l’informatique et les libertés, la protection des personnes et de leur vie privée, sur les propos racistes et
antisémites. Reste à dégager, pour la justice et ses auxiliaires, les moyens, y
compris sur internet, de la mise en œuvre de ces différentes lois. Elle lui
demande donc quelles sont les intentions du gouvernement quant à la procédure d’établissement de la liste des données qui seront incluses dans le
décret précisant la loi relative à la sécurité quotidienne. Elle lui demande
également de surseoir à la rédaction de ce décret, pour permettre la mise en
place d’une commission de travail compétente sur l’opportunité de conservation de chaque type de données, associant tous les acteurs concernés et
aboutissant à la production d’un document qui ne soit pas que l’expression
d’une angoisse exacerbée par la violence extrême d’actes isolés.
Réponse – Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, fait connaître à
l’honorable parlementaire qu’il ne partage pas les craintes que celle-ci
exprime quant à un caractère attentatoire aux libertés fondamentales du
dispositif prévu par l’article 29 de la loi du 15 novembre 2001 relative à la
sécurité quotidienne, lequel permet au gouvernement de prendre par voie
réglementaire des mesures conduisant les opérateurs de télécommunications à conserver pendant une durée maximale d’un an certaines données
techniques relatives aux communications, dites parfois « données de
connexion ». En effet, ces mesures, dont le but exclusif est de permettre en
tant que de besoin la mise à disposition de l’autorité judiciaire de telles ou
telles de ces données, ne sauraient en aucun cas être assimilées, ainsi qu’il
est suggéré par l’auteur de la question, à une surveillance systématique de
l’information circulant sur les réseaux de communication, ou à un dispositif
d’écoute généralisé de l’ensemble des citoyens français. Sur ce point, il est
en effet clairement énoncé par la loi susvisée que les données ainsi conservées, si elles rendent possible l’identification de l’utilisateur d’un service de
télécommunications, ne peuvent en revanche d’aucune manière porter,
comme le ferait une interception de correspondance émise par la voie des
télécommunications, sur le contenu des correspondances échangées ou
des informations consultées. Ces raisons expliquent que la conservation
temporaire des données dites de connexion ne constitue pas à proprement
parler une ingérence dans la liberté d’expression et de communication. Il
doit du reste être observé que les dispositions suscitant les inquiétudes de
l’honorable parlementaire sont en stricte conformité avec les possibilités
expressément ménagées aux États dans un but de prévention, de
76