Livre blanc de la sécurité intérieure
La vidéoprotection
Un outil de sécurisation devenu majeur
Depuis ses débuts au tournant des années 1980-1990, la vidéoprotection
s’est progressivement installée comme un outil important des politiques
de sécurité intérieure. Aujourd’hui la vidéoprotection est utilisée tant
pour les politiques de prévention, notamment des actes de délinquance,
que pour l’élucidation des crimes et délits en appui à l’action des
enquêteurs. Elle est devenue un support technique important pour les
forces de sécurité intérieure et peut pallier partiellement l’impossibilité
qu’elles ont d’être présentes sur tous les terrains le nécessitant. Certains
dispositifs se limitent à la mise à disposition a posteriori des images
enregistrées, d’autres, plus ambitieux, permettent de les visionner et de
les exploiter en direct à partir de centres de supervision urbain (C.S.U.)
ou de PC vidéo.
Outil important pour les forces de sécurité, la vidéoprotection a été
largement adoptée par les acteurs ayant la charge de la sécurisation
de lieux et de personnes. Alors que l’on dénombrait près de 15 000
caméras sur la voie publique en 2006, on en compte 60 000 en 2020. Si
436 communes s’étaient équipées en 2006, elles sont aujourd’hui 6 000.
A côté des caméras sur la voie publique exploitées par les mairies ou les
intercommunalités, les caméras ont été adoptées par les commerces et
les bâtiments industriels et commerciaux.
La vidéosurveillance paraissait à l’origine attentatoire à la vie privée et
la loi de 1995 a conditionné son déploiement à des très nombreuses
garanties, sous le contrôle de la CNIL. La loi institue un régime
d’autorisation administrative accordée pour une durée de cinq ans
sur la base d’un cahier des charges juridique et technique protecteur
pour les libertés individuelles. L’opinion publique a progressivement
évolué vers un consensus face aux apports de la vidéoprotection pour
la sécurité collective. Par exemple, l’utilisation de la vidéoprotection
dans l’identification des auteurs d’attentats terroristes a contribué
à modifier la perception de ces dispositifs. Le contentieux relatif à la
vidéoprotection est du reste très faible. La perception sociale de la
vidéoprotection peut aussi être modifiée par une évolution du rapport
à l’image à l’ère des réseaux sociaux.
S’adapter aux nouvelles possibilités et aux nouveaux enjeux
Aujourd’hui, la quatrième révolution industrielle incarnée par le
numérique et l’accélération du rythme des innovations interroge
fondamentalement le cadre juridique de la vidéoprotection. Face
à l’évolution des usages possibles, des pratiques et des supports
technologiques de dernière génération, le corpus juridique de la
vidéoprotection semble en effet obsolète. Il repose en effet sur la loi
du 21 janvier 1995, modifiée à la marge (loi sur la sécurité Intérieure de
2006, loi d’orientation et de programmation sur la sécurité intérieure de
2011, loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très
petites entreprises notamment). La loi informatique et libertés modifiée
au 1er juin 2019 a cependant posé des principes restrictifs à certains
usages technologiques ou à certains usages de la vidéosurveillance
dans les espaces privés. Il en ressort une forme de décalage entre l’état
de la réglementation et la réalité technique et sociétale, notamment
la multiplication des smartphones individuels alimentant les réseaux
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