Livre blanc de la sécurité intérieure

La désignation d’un chef de file opérationnel paraît effectivement
essentielle pour permettre de mieux coordonner l’action des différents
services et de délimiter les champs d’action respectifs.
Le ministère de l’Intérieur s’inscrit pleinement dans cette évolution, au
travers des mutations déjà engagées par la direction centrale de la police
judiciaire avec la création, depuis 2019, de la sous-direction de la lutte
contre la criminalité financière (SDLCF) et de quatre offices financiers
(office anti-corruption, office de la fraude fiscale, office anti-blanchiment
et office d’identification des avoirs).
De son côté, la gendarmerie nationale s’est résolument engagée dans
la lutte contre le travail illégal et la fraude aux prestations sociales(24)
en adaptant ses outils à l’évolution du cadre normatif et à la définition
des priorités gouvernementales. Déjà compétent pour les fraudes aux
cotisations sociales et à certaines prestations (revenus de remplacement),
son office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) est aujourd’hui
le partenaire naturel des organismes publics, victimes des fraudes aux
prestations et cotisations sociales avec lesquels il travaille étroitement
au quotidien. Il a développé une expertise dans le traitement de ce
contentieux, en s’attachant notamment à systématiser la captation des
avoirs criminels dans le but de garantir le recouvrement des créances.
Enfin, avec l’apparition en France comme en Europe, de phénomènes de
traite d’êtres humains aux fins de contraindre des personnes vulnérables à
percevoir indûment des prestations des organismes sociaux qu’ils reversent
aux trafiquants, l’extension du champ de compétence de cet office aux
fraudes sociales pourrait constituer une réponse efficace en s’attaquant
aux formes les plus graves de cette criminalité insidieuse au coût humain et
financier insupportable.
Plusieurs axes d’évolution ont d’ores et déjà été détectés par le ministère de
l’Intérieur qui pourront participer, dans le cadre du dialogue interministériel
proposé, à cette mutation nécessaire. Le rôle des groupes interministériels
de recherche (GIR) pourra être défini pour axer leur action sur la détection
des infractions sous-jacentes relevant de l’économie souterraine et revisiter
leur articulation avec les autres services pour renforcer l’identification et
la saisie des avoirs criminels. Une cartographie de l’ensemble des services
concourant à la répression de la criminalité financière pourra être réalisé,
quel que soit leur rattachement, pour corriger les redondances.
Enfin, l’organisation des services doit être aussi mieux intégrée par les
partenaires privés, acteurs essentiels dans le monde économique (banques
et assureurs dans un premier temps). A l’exemple de nombreux pays dans le
monde, la France doit se doter d’un partenariat public privé. Recommandé
par la conférence « No Money for Terror » d’avril 2018, ce partenariat doit
être le moyen d’échanger, même de façon informelle, dans un cercle de
confiance. Les relations entre acteurs institutionnels et les acteurs privés
de la finance sont encore trop régis sous le format d’une pyramide de
subordination.

24
La Cour des comptes estime le montant annuel de la fraude aux prestations sociales à
25 milliards d’euros (entre 16 et 20 milliards de cotisations sociales et entre 3 et 4 milliards de
prestations sociales).

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